Grand marché de Kinshasa : le phénomène « lavement des pieds » fait recette

Mercredi 25 Décembre 2013 - 12:15

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Laver les pieds boueux des personnes désireuses moyennant un petit rien est une drôle de pratique qui tend à s’installer à Kinshasa où tous les moyens sont bons pour se faire des sous.  

Beaucoup de Kinois, qui entrent au Grand marché par ces temps qui courent, en ressortent souvent avec des pieds bourbeux. Signe que nous sommes bien en période de pluies. Les eaux stagnantes qui jonchent certains périmètres de ce marché constituent un sérieux obstacle pour les passants souvent obligés d’effectuer des sauts en longueur à la Carl Lewis pour les contourner. Un exercice pas toujours affectionné par la gent féminine qui s’en tire plutôt mal. Celles qui ont le malheur de se chausser en babouche ou en sandale passent de mauvais moments à ces endroits malsains qui ternissent l’image de ce haut lieu du commerce. Difficile dans ces conditions de ressortir du marché propre, surtout avec la promiscuité ambiante qui y règne.

Pour pallier cette situation, un groupe de jeunes désœuvrés a trouvé une astuce : laver les pieds boueux des femmes soucieuses de leur propreté. Le contrat se négocie à 100 FC ou 200 FC selon la hauteur de la bourse de la cliente. Après chaque pluie, on voit ces jeunes étaler leurs bassines à l’entrée qui donne sur l’avenue Kasa-Vubu. Des femmes se précipitent pour bénéficier de leur service. Ces bienfaiteurs d’un genre nouveau appliquent, sans scrupule, le fameux « article 15 » (entendez la débrouillardise). Munis des savons et autres produits, ils ne se font pas prier pour nettoyer les pieds de leurs clientes en public. « L’argent n’a pas d’odeur », dirait-on. Les femmes se plaisent à ce business d’un type nouveau. « Au lieu d’aller faire le Kuluna, je préfère gagner honnêtement ma vie de la sorte. Il m’arrive de m’en tirer avec 3000 FC surtout en période de fortes pluies », explique un jeune laveur de pieds.

Ce qui n’était au départ qu’un service rendu à la population tend à prendre les contours d’une activité normale. Demain, il y en aura encore d’autres  laveurs de pieds  qui vont surement grossir les rangs de ceux qui opèrent déjà sur l’avenue Kasa-Vubu. Comme quoi, le Kinois ne manque pas d’imagination.    

    

 

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Une vue du marché Gambela