Interview. Bélinda Ayessa : « Cette pandémie du Covid-19 doit nous amener à faire tous bloc derrière le chef de l’État»Samedi 11 Avril 2020 - 16:15 L’humanité tout entière est secouée depuis pratiquement novembre 2019 par le Covid-19. Au Congo- Brazzaville, le président de la République, Denis Sassou N’Guesso, a édicté des mesures visant à juguler cette pandémie. Dans un entretien exclusif, la directrice générale du Mémorial Pierre-Savorgnan-de-Brazza, Bélinda Ayessa, revient sur ces mesures, parle de la vie socioéconomique et culturelle après le passage de ce virus au Congo comme ailleurs et tire les leçons. Les Dépêches de Brazzaville (L.D.B.) : Le monde vit une situation jamais vécue auparavant avec la crise du Covid-19. Les pays s’organisent et c’est le cas du Congo où le top a été donné le 28 mars par le président Denis Sassou N’Guesso. Que dire des mesures qu’il a édictées ? Bélinda Ayessa (B.A.) : Les temps que nous traversons sont si étranges. La propagation exponentielle du Covid-19 et la fulgurance de ses dévastations constituent une vraie crise sanitaire. C’est une situation inédite, comme vous le dites, tant par son étendue que par sa létalité. Et dans ce contexte global, nous apprenons beaucoup de l’expérience des autres régions du monde. En raison de la vitesse de sa propagation, on voit bien que tous les modèles classiques d’intervention en matière de santé publique sont pris de cours. Voilà pourquoi la part prise par les mesures édictées par le président Denis Sassou N'Guesso de l’État relève des dispositions, aujourd’hui, attestées par tout le corps médical qui visent à juguler la propagation de la pandémie. La prévention, en pareille circonstance, est une démarche de responsabilité et de protection. Cela commence par les gestes barrières, en passant par la distanciation sociale et le confinement, et jusqu’à la fermeture des frontières, lieux de cultes, des écoles, etc. L.D.B. : En tant qu’observatrice de la vie publique, pensez-vous que ces mesures sont appliquées par le gouvernement et la population ? B.A. : De façon générale, des mesures inédites en situation pandémique déstabilisent toujours les habitudes de vie quotidienne. Au regard des voies classiques en santé publique par exemple, le gouvernement est en ordre de bataille. Ce que j’observe indique que les risques qu’encoure la population sont pris au sérieux. Il y a une mobilisation évidente pour faire corps contre ce fléau. Le 10 avril dernier, la coordination nationale de la gestion de la pandémie s’est réunie sous la houlette du président de la République. Et des mesures complémentaires et nouvelles ont été annoncées. Elles concernent les aspects sanitaire, social et économique. Je ne puis les énumérer toutes ici, mais je voudrais en souligner la continuité avec celles déjà annoncées, le 28 mars 2020. Quant au comportement de la population, il est à craindre que beaucoup ne comprennent pas encore qu’il y a péril en la demeure. Plutôt que de s’appliquer dans la stricte observance des mesures de prévention, certains en sont encore à gloser sur telle ou telle décision. Puisque vous m’en donnez l’occasion, j’aimerais dire ici combien il est impérieux de relever le défi du coronavirus par l’autodiscipline et la protection des autres. L.D.B. : Quelles dispositions avez-vous prises au Mémorial Pierre-Savorgnan-de-Brazza, en rapport avec l’adresse du chef de l’État ? B.A. : Au Mémorial, conformément à ce que le chef de l’État et la coordination nationale de gestion ont prescrit, nous avons baissé drastiquement le niveau de nos activités. Nous avons néanmoins maintenu des activités internes de maintenance et d’entretien. L.D.B. : Vous avez reconnu plus haut que des efforts importants ont été faits par le gouvernement et la population. Pourtant, une certaine opinion pense que très peu de choses ont été réalisées. B.A. : L’imprévisibilité de cette pandémie et le caractère anxiogène du Covid-19 font que nous devons nous garder d’instrumentaliser le débat. Aucun pays au monde ne pouvait prévoir l’ampleur de cette crise. Des plus puissants États aux plus démunis des systèmes de santé, on voit bien que ce qui se vit à l’échelle planétaire nécessite solidarité et retenue dans l’usage de la parole publique. Je suis, moi aussi, l’actualité mondiale. Et j’observe que notre situation n’est pas pire qu’ailleurs. Ce n’est pas une consolation, mais nous devrions d’abord comprendre que nous sommes face à une crise qui exige une vraie mutualisation des efforts. Si, comme pense une certaine opinion, pour reprendre votre expression, peu de choses ont été réalisées, cela signifie-t-il que rien n’a été fait ? Ne pensons pas que dans cette lutte contre le Covid-19, tout doit dépendre du gouvernement. La population a également sa part de responsabilité. L.D.B. : Qu’en pensez-vous de la vie socioéconomique et culturelle après le passage Covid-19, au Congo comme ailleurs ? B.A. : Vivement la fin de cette pandémie ! Les scientifiques y travaillent activement. Et nous attendons tous la bonne nouvelle qui nous rassurera. Difficile d’établir les indicateurs des changements sur le long terme. Mais les impacts que le Covid-19 aura sur les liens sociaux, les prévisions de la croissance économique et la vie culturelle sont immenses. Nous aurons à réapprendre à vivre ensemble avec une extrême prudence sur les conditions d’hygiène, à penser nos économies avec une forte prévision sur les risques, et enfin à vivre l’après-coronavirus comme un vrai basculement dans une nouvelle vision du monde. Il y aura certainement des leçons importantes à tirer après cette pandémie. Car la pandémie qui sévit actuellement aura au moins rappelé à tous que, où que nous soyons, qui que nous soyons, nous partageons une commune humanité. Elle nous oblige désormais à penser les nouvelles formes de solidarité entre hommes, entre Etats. Au-delà des mesures conjoncturelles, au demeurant bien utiles, nous aurons appris la nécessité de nous garder espoir même dans un environnement parfois incertain. L.D.B. : Quelle leçon tirez-vous ? Et ce sera votre mot de la fin. B.A. : Ne jamais perdre confiance en l’homme dans sa volonté de freiner ce qui attente à sa vie. Voilà ma propre leçon. Le combat contre la pandémie du Covid-19 nous apprend également que des espaces nouveaux de compassion et d’engagement sont toujours possibles pour aider l’humanité à se relever des crises, fussent-elles sanitaires ou économiques. En attendant, continuons de mener le combat le plus urgent, celui contre la propagation du coronavirus. Enfin, cette pandémie doit nous amener à faire tous bloc derrière le chef de l’État. Bruno Okokana Légendes et crédits photo :Bélinda Ayessa, directrice générale du Mémorial Pierre-Savorgnan-de-Brazza (crédit photo/ DR) Notification:Non |