Massacre de Yumbi : la société civile accuse l’autorité provinciale de Maï-Ndombe

Jeudi 27 Décembre 2018 - 19:41

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

La Commission électorale nationale indépendante (Céni) a décidé, le 26 décembre, de renvoyer à mars 2019 les élections dans les circonscriptions de Butembo et Beni dans la province du Nord-Kivu, et de Yumbi dans la province de Mai-Ndombe. Si les raisons évoquées par la Céni à propos des deux villes du Nord-Kivu ont trait à l’épidémie d’Ebola, le renvoi des scrutins dans le territoire de Yumbi concerne l’insécurité.

Il y a eu des tueries à Yumbi, Bongende (30 km de Yumbi) et Nkolo Yoka (15 km de Yumbi) dans la province dirigée par le gouverneur Gentiny Ngobila, le 16 décembre. L’on apprend que les fidèles d’une Église du message du temps de la fin, du prophète William Branham, en plein culte, auraient été brûlés, deux militaires des forces navales décapités. A Bongende, à 30 km de Yumbi où est parti ce conflit, tout aurait brûlé, témoigne-t-on. Quelques jours après ce massacre aux allures d’un génocide qui a connu plus de quatre cents morts, plusieurs blessés et déplacés, des maisons incendiées, des langues se délient, des révélations sont faites sur l’origine de ces affrontements intercommunautaires.

La société civile de Yumbi a vécu et suivi cet événement macabre et recueilli des déclarations de personnes rescapées, pour la plupart hospitalisées dans les différents centres de santé de cette cité . « La planification du massacre aurait été faite au niveau du gouvernorat de la province de Maï-Ndombe. Les deux équipes d’assassins (groupe de policiers et militaires recrutés) sont parties de deux endroits, à savoir la ville de Kinshasa et d’Inongo, pour faire jonction à la cité de Mansele (cité habitée par la tribu Tiene) dans le territoire de Yumbi », affirme la société civile locale.

Et d’indiquer que le premier groupe d’assassins venu d’Inongo serait arrivé à Mansele par véhicules et les deux Jeeps qui les avaient amenés appartiendraient à la division provinciale de la Santé, avec un certain Bekonda comme chef de division. « Ces mêmes Jeeps ont elles aussi acheminé à bord les matériels de campagne de M. Mbanga Randolphe, directeur de cabinet adjoint de M. Ngobila Mbaka et candidat à la députation nationale dans le territoire de Yumbi », révèle la société civile de ce territoire, précisant même que « ces deux Jeeps ont eu comme conducteur M. Buro, non autrement identifié, chauffeur de la Jeep du Programme lèpre et tuberculose, et de M. Elve, non autrement identifié et chauffeur de la Jeep PNMLS ».

En outre, renseigne la société civile de Yumbi, « le deuxième groupe de criminels est parti de Kinshasa et a voyagé à bord du bateau Kebakuni, propriété de M. Ngobila Mbaka, gouverneur de la province de l’Equateur et leader de la tribu Tiene ». La société civile de Yumbi soutient que la jonction entre les deux groupes venus d’Inongo et de Kinshasa a été faite dans la cité de Mansele où certains éléments de la police de la tribu Tiene, oeuvrant soit dans le territoire de Yumbi, soit dans le territoire de Bolobo, auraient été associés à ce plan criminel.

Nommément cité par la société civile de Yumbi et, surtout, dans un rapport préliminaire établi par la Mission des Nations unies pour la stabilisation au Congo comme ayant dépêché la police et des hommes armés déguisés en civil à Yumbi qui ont pris le parti des Batende dans ce conflit les opposant aux Banunu, le gouverneur Gentiny Ngobila a démenti, il y a quelques jours, ces allégations, rejetant le caractère politique que l’on attribuerait au conflit. « C’est un conflit qui n’a rien de politique. Il n’y a aucun soubassement politique dans ce conflit », avait-il indiqué.

Selon l’ancien président du club de football Daring Club Motema Pembe de Kinshasa devenu gouverneur de la province de Maï-Ndombe, il s'agit d'un conflit foncier. « Ce conflit est récurrent dans toute la province. Les ethnies rivales revendiquant chacune avoir des droits sur les terres querellées », a expliqué à Radio France internationale Gentiny Ngobila. « Pourquoi dois-je embraser la province ? En 2018 ici, les élections qui auront lieu dimanche prochain, je ne suis pas candidat. Quel intérêt pour moi d’aller créer des désordres là-bas ? Au contraire, je dépense même de ma poche pour amener un peu de sécurité dans cette partie du pays. Vraiment, comme j’ai dit tout à l’heure, il faudrait vraiment être une ordure, un salopard ou un enfoiré pour commencer à croire qu’un gouverneur peut envoyer les hommes en armes, les policiers, les militaires », s’est-il défendu. Aussi a-t-il annoncé l’arrestation du groupe des assassins présumés de l’administrateur de Yumbi qui a perdu la vie au cours de ce massacre.

Pour sa part, la société civile locale sollicite une implication de la communauté tant nationale qu’internationale en vue de prendre en compte ces éléments d’informations pour faire éclater toute la lumière sur ce massacre aux allures d’un génocide dans l’espoir de déférer devant les instances judiciaires toutes les personnes impliquées.

Martin Enyimo

Notification: 

Non