Multinationales : un accord sur la fiscalité déplaît

Mercredi 7 Juillet 2021 - 14:25

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L'accord inclusif présenté par le G20 et l'OCDE sur la fiscalité des multinationales ne rencontre pas l’assentiment de tout le monde.

Les ministres des Finances du G20 valideront, le 10 juillet prochain, l’accord inclusif proposé par le G20 pour la réforme de la fiscalité internationale. Cette évolution, selon certaines voix, ne sert pas les préoccupations de l’Afrique et d’autres pays en développement.

L'accord sur la fiscalité présenté en fin de semaine dernière par le groupe de travail mis sur pied par le G20 et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) ne convainc pas tout le monde. Plusieurs organisations internationales et africaines ont publié des documents qui mettent en avant les limites de ce que la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, a pourtant qualifié d’avancée significative, lors de la conférence de presse sur la situation de l'économie américaine, le 2 juillet.

Cette proposition de réforme fiscale qui a obtenu l'accord de 130 pays repose sur deux piliers. Il y a d'une part, l'adoption du principe d'un impôt minimum mondial d’au moins 15 %. Son objectif est de neutraliser l'effet des paradis fiscaux à taux d'imposition zéro et qui favorise l'évasion fiscale. D'autre part, la redistribution d’une partie du surplus de profits des multinationales aux pays dans lesquels elles réalisent des bénéfices sans avoir une présence physique.

Pour le Forum de l'administration fiscale en Afrique (ATAF), cette avancée principalement obtenue par les pays les plus riches de la planète n'a pas tenu compte de l'ensemble des préoccupations des pays pauvres. L'Organisation estime qu'un impôt minimum de 15% reste faible et que le taux de 20% aurait été meilleur. Elle pense aussi que le mode de calcul et surtout de redistribution est complexe et peu clair. Elle soulève, enfin, le fait qu'il y aura un coût d'implémentation de la réforme en Afrique qui ne sera pas facile à mobiliser pour les pays africains.

La Commission indépendante pour la réforme de la fiscalité internationale des multinationales est dans le même ordre d’idées. « L'accord du cadre inclusif n'est pas à la hauteur de la réforme globale dont le monde a besoin et ne reflète pas les demandes que les pays en développement ont formulées au cours des dernières semaines pour une redistribution plus importante et plus juste des droits d'imposition pour les entreprises les plus grandes et les plus rentables et pour un taux minimum d'imposition mondiale suffisamment élevé pour garantir que des revenus significatifs sont générés et partagés équitablement », a-t-elle fait savoir dans un communiqué.

Rappelons que l'accord trouvé par le cadre inclusif de l'OCDE sera soumis à la validation des ministres des Finances du G20, les 9 et 10 juillet à Venise, en Italie. Plusieurs dirigeants des pays membres de cette organisation ont affiché leurs satisfactions. « Les sociétés multinationales ne pourront plus opposer les pays les uns aux autres, dans le but de faire baisser les taux d’imposition et de protéger leurs bénéfices », a fait savoir le président américain Joe Biden. Le ministre allemand des Finances, Olaf Scholz, a évoqué un « important pas vers une plus grande justice fiscale », et pour le Français, Bruno Le Maire, on assiste à « l’accord fiscal international le plus important conclu depuis un siècle ». Les Britanniques, quant à eux, saluent une « nouvelle étape » vers une réforme de la fiscalité mondiale.

Cet accord n'apporte pourtant pas de solution fiscale concrète pour l'Afrique. Même si le continent est un important marché pour les grands groupes du digital, l'essentiel de l'économie réelle y est soutenu par l'exploitation et la production des ressources du sol et du sous-sol. Or, dans le cadre de la fiscalité du secteur extractif dominé par des multinationales cotées sur les marchés financiers des pays du G20, il existe de nombreux avantages fiscaux au-delà de l'impôt sur le bénéfice ou les dividendes.

Les salaires des ressources humaines étrangères, les abattements de droits de douane, les amortissements accélérés sont autant de facilités que les pays accordent souvent aux partenaires à l'exploration. Aussi, il y a une composante du service sur le commerce avec l'Afrique. De nombreuses multinationales ont recours à des filiales pour bénéficier de l'assistance technique ou du droit d'utiliser des marques. Ces services sont soustraits de la base imposable dans les pays africains, et comme ce ne sont pas de bénéfices, ils ne tomberont pas sous le coup de la réforme actuellement en cours de finalisation.

Josiane Mambou Loukoula

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