Musique : un concert à la Maison d’arrêt de Brazzaville

Jeudi 5 Janvier 2023 - 16:35

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Enfin, pourrait-on dire ! La musique a pénétré, le 1er janvier, les murs de la Maison d’arrêt de Brazzaville où l’artiste Parfait Young y aura apporté un peu d’évasion, le temps d’un concert.

 L’an 2022 a basculé dans la nuit sur celui de 2023. Le premier jour de cette nouvelle année, les nuages et la pluie se sont invités au dessus de la capitale où la Maison d’arrêt de Brazzaville, quatre-vingts années après sa construction, semble avoir fait le vœu d’une nouvelle résolution, celle d’apporter dans ses murs un peu de musique, celle là même dont on dit qu’elle adoucit les mœurs.  Ici, en République du Congo, c’est une grande première, un immense bond en avant vers un immense progrès social. Si l’action culturelle en détention est un sujet prétexte à débats, on ne peut qu’espérer qu’elle se tienne en dehors de toute considération critique au regard de cette main qu’elle tend à  une humanité trop souvent laissée pour compte derrière les barreaux.

Il est donc presque midi et la pluie dans sa parfaite habitude a retardé le moment tant attendu par une soixantaine de détenus. Face à eux, quatre musiciens, orphelins d’une scène en planches et d’un moindre jeu de lumières. Mais la magie opère ; inévitablement.  Sous les doigts de Parfait Young à la guitare, de  Willy Bourdon à la basse, de Prince Missapi au piano et sous les baguettes  de Noël Sidney à la batterie, le concert  commence avec « Frères de sang », une chanson de Parfait Young et se finit deux heures de retard avec les larmes aux yeux. « A ma façon, je suis venu apporter un peu d’évasion, souffler un vent d’espoir et échanger avec eux sur la citoyenneté. Voir ces femmes, ces hommes, jeunes et vieux, ce public privé de sa liberté, c’est forcément  quelque chose d’émotionnellement intense. Oui, mes musiciens et moi en avons eu les larmes aux yeux », raconte Parfait Young dont les thématiques de son répertoire traitent d’amour, de cohésion sociale, du vivre-ensemble.  Pour la petite histoire, il faudra se souvenir que Johnny Cash, le 1er janvier 1959, avait donné un concert à la prison de Saint Quentin en Californie et que 64 ans plus tard et jour pour jour, Parfait Young aura donné le sien à la Maison d’arrêt de Brazzaville.  Pour bien faire il n’est jamais trop tard !

Le 1er janvier 2023 congolais aura donc marqué d’une pierre blanche l’accès possible à un concert pour celles et ceux qui paient leurs dettes à la société à l’abri des regards du monde libre. Que la culture force les verrous pour faire entendre la voix d’une possible rédemption est aujourd’hui un progrès majeur pour la Maison d’arrêt de Brazzaville dont peut se féliciter M. Como, directeur de la réinsertion sociale et de l’action judiciaire. A la Maison d’arrêt de Pointe-Noire d’emboîter son pas et de ne pas laisser lettre morte aux demandes lui ayant été faites depuis plusieurs mois quant au concert de l’artiste Zina Hope, désireuse elle aussi d’apporter son brin de lumière à l’ombre des geôles ponténégrines.

 

Philippe Édouard

Légendes et crédits photo : 

Parfait Young lors du concert

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