Santé : la prévention des maladies infectieuses en Afrique pourrait ralentir si l’UE diminuait son aide

Samedi 20 Juillet 2013 - 9:15

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Selon un nouveau rapport du Programme commun des Nations unies sur le VIH-sida (Onusida) et l’Union africaine (UA), l’Afrique aurait progressé dans la lutte contre la tuberculose et le VIH. Mais cela n’a pas empêché l’augmentation des décès, dus notamment au paludisme dans de nombreux pays africains

Ce nouveau rapport vient douze ans après l’engagement pris par les dirigeants africains à Abuja (Nigeria) d’allouer au moins 15% de leur budget national à la santé et d’améliorer la prévention conte le VIH, la tuberculose et le paludisme. Pour soutenir l’action africaine, suite à la Déclaration d’Abuja, l’Union européenne (UE) avait lancé, un mois après, un programme d’action pour lutter contre les maladies infectieuses. Depuis lors, les budgets nationaux consacrés à la santé dans tous les pays membres de l’UA ont presque quadruplé, passant de 14 milliards à 52 milliards de dollars.

Les financements privés auront cependant dépassé les dépenses publiques, grimpant de 17 milliards en 2001 à 55 milliards de dollars en 2011. Ainsi, seuls six des cinquante-quatre États membres de l’UA ont à ce jour atteint l’objectif d’Abuja de 15% (Liberia, Madagascar, Malawi, Rwanda, Togo et Zambie), selon les données de l’OMS. Si les taux de la tuberculose et du VIH ont baissé, celui du paludisme, à l’origine d’un nombre de morts « démesuré de femmes enceintes et d’enfants de moins de cinq ans est plus mitigé », selon le document. Les gouvernements africains et les donateurs internationaux ayant consacré plus d’efforts aux crises sanitaires, une réduction des dépenses pourrait malheureusement interrompre, voire freiner ces améliorations dans la lutte contre les maladies infectieuses, craint le rapport.

Le directeur du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, Mark Dybul, a lancé un appel à l’UE et à d’autres donateurs afin qu’ils maintiennent leurs engagements en faveur de la lutte contre les maladies infectieuses malgré leurs défis budgétaires. « Nous pouvons dire aujourd’hui que nous avons les connaissances et les capacités pour vaincre ces trois maladies et contrôler complètement ces menaces pour la santé publique. Malheureusement, le revers de la médaille est que si nous n’agissons pas maintenant, il serait raisonnable et compréhensible d’attendre plusieurs années avant de lutter contre ces maladies de façon prononcée, étant donné la reprise économique. Mais les maladies infectieuses ne prennent pas en compte les crises financières et les cycles budgétaires », a-t-il précisé. Mark Dubyl vient de demander à l’UE 15 milliards de dollars supplémentaires pour éviter les écarts dans le traitement et la prévention des cycles budgétaires.

Selon un autre rapport, publié en avril par le Fonds mondial, il faudrait 87 milliards de dollars pour financer des programmes dans 151 pays d’ici 2016. Pour y parvenir, des donateurs existants, des gouvernements bénéficiaires et des donateurs privés devraient fournir environ 72 milliards de dollars. 87 milliards de dollars permettraient de traiter 17 millions de patients atteints de la tuberculose, fournir des traitements antirétroviraux à 18 millions de personnes atteintes du VIH, et d’éviter 196 000 décès dus au paludisme. On sait déjà que les financements des plus grands contributeurs, dont la Commission européenne, les pays de l’UE, les États-Unis et le Japon, vont diminuer légèrement.

Afrique subsaharienne

69% des 34 millions de cas de VIH dans le monde seraient dépistés en Afrique, dont 90% des personnes infectées seraient des femmes enceintes et des enfants. L’Afrique subsaharienne serait touchée de manière disproportionnée par la tuberculose, le paludisme et le VIH. Un cas sur quatre dans la région n’est pas déclaré, estiment l’Onusida et l’UA, tout en reconnaissant « des progrès constants dans la lutte contre ces infections », une chute du nombre de décès dus au sida (de 32% entre 2005 et 2011) et de nouvelles infections chez les enfants (au moins 50%) dans certains pays africains, et un accès amélioré aux traitements antirétroviraux. Le rapport rappelle que le paludisme reste la maladie la plus mortelle en Afrique, avec 600 000 décès en 2010 et 174 millions de cas en Afrique, soit 17% de la population.

Le rapport recommande l’amélioration de la qualité de l’éducation sanitaire et la formation professionnelle, l’encouragement de la coopération entre les pays africains en leur sein, le renforcement de la protection sociale entre les populations les plus vulnérables, la création d’une organisation de l’UA compétente dans les affaires sanitaires pour « parler d’une seule voix dans les négociations avec les donateurs et les organisations internationales ».

 

Noël Ndong