UE-Burundi : Gitega et Bruxelles sont-elles prêtes à retourner à leurs relations traditionnelles ?

Lundi 10 Mai 2021 - 11:45

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Les discussions entre les deux parties, entamées le 2 février dernier à Bujumbura, se poursuivent normalement. Elles devront à terme déboucher sur la normalisation de la coopération bilatérale après la levée éventuelle des sanctions budgétaires prises contre le pouvoir burundais au début de la crise de 2015 pour « de graves violations des droits de l’homme ».

Plusieurs sujets sont sur la table des négociations, dont la gouvernance, la lutte contre la corruption, la liberté de parole et d’association, les violations des droits de l’homme, le déverrouillage de l’espace politique et l’accès des sociétés occidentales aux marchés publics. En rapport avec ces points, l’Union européenne (UE) s’attend à ce que le gouvernement burundais donne la preuve des mesures concrètes pour procéder à la suspension des sanctions.

Dans le cadre d’une feuille de route établie pour la circonstance, qui doit permettre aux délégations européenne et burundaise d’aboutir rapidement à une solution satisfaisante, il est prévu des rencontres hebdomadaires au niveau des équipes techniques ponctuées chaque mois d’une rencontre entre le chef de la diplomatie burundaise et les ambassadeurs de l’UE et de ses Etats membres. Ce qui va permettre de faire le point du travail entrepris avant l’échéance de fin novembre de cette année, date à laquelle il sera mis fin aux accords de Cotonou, chaque pays devant désormais être traité par l’organisation communautaire européenne comme un cas particulier.

Le chef de la représentation diplomatique de l’UE au Burundi, Claude Bochu, estime que les discussions bilatérales se font dans un climat de confiance mutuelle. « Nous commençons à voir le bout du tunnel », s’en félicite le ministre burundais des Affaires étrangères, Albert Shingiro, qui dit espérer que d’ici peu, Gitega et Bruxelles vont renouer avec leurs bonnes relations d’antan et « lever toutes les zones d’ombre » ayant caractérisé les relations entre les deux parties depuis cinq ans.

Albert Shingiro attendu dans certaines capitales européennes

Du fait du réchauffement en cours de ces liens, le chef de la diplomatie burundaise est invité à une tournée européenne. Cela fait longtemps qu’un ministre burundais « n’est plus allé ni à Bruxelles, ni à Paris », fait remarquer Claude Bochu, ajoutant qu’il appartient maintenant au gouvernement burundais de définir certaines modalités de ce voyage de concert avec les autorités françaises ou européennes.

Les sanctions de l’UE contre le Burundi, notamment la suspension de toute aide directe au gouvernement en mars 2016, est un coup dur pour le pouvoir burundais qui perd son principal bailleur de fonds. Ce qui a valu au pays la perte de 430 millions d’euros qui devaient être octroyés dans le cadre du 11ème Fonds européen pour le développement (FED), un programme qui allait s’étendre de 2014 à 2020. Cette situation n’a pas empêché les autorités burundaises, malgré les critiques sur la question des droits de l’homme, de poursuivre la répression contre l’opposition et la société civile.

Du côté européen, les mesures prises contre Gitega ont provoqué aussi de sérieuses conséquences. En effet, l’UE et ses États membres ont perdu toute influence au Burundi, au profit de la Chine et de la Russie. En témoigne le fait que les diplomates européens n’étaient plus reçus dans aucun cabinet burundais.

Pour un ambassadeur africain qui exprimait sous couvert d’anonymat, « l’UE et ses États membres se sont rendus compte que les sanctions étaient contre-productives ». « Le régime du CNDD-FDD (Conseil national pour la défense de la démocratie-Forces de défense de la démocratie) a de son côté désespérément besoin d’argent frais », souligne-t-il, ajoutant que les deux parties doivent à tout prix s’entendre. A ce sujet, alors que certains parlementaires européens s’insurgent contre le dialogue UE-Burundi, Anschaire Nikoyagize, le président de la Ligue burundaise des droits de l’homme Iteka pense que « l’UE ne doit pas sacrifier les droits de l’homme en faveur des relations diplomatiques ».

Nestor N'Gampoula

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