Terrorisme : le Soudan retiré de la liste noire américaine

Mardi 15 Décembre 2020 - 12:23

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Les États-Unis ont formellement retiré, le 14 décembre, le Soudan de leur liste des pays soutenant le terrorisme, moins de deux mois après que ce pays arabe a accepté de normaliser les relations avec Israël.

Les autorités soudanaises de transition, en place depuis mi-2019 après la révolte qui a chassé du pouvoir Omar el-Béchir, ont salué cette décision qui doit mettre fin à près de trois décennies d’isolement et suscite l’espoir d’une sortie de crise économique.

Le 23 octobre, le président américain Donald Trump avait coup sur coup annoncé sa décision de retirer le Soudan de la liste des États soutenant le terrorisme et l’accord de Khartoum de normaliser ses relations avec Israël.

« La période de notification au Congrès américain de 45 jours ayant expiré, le secrétaire d’État a signé une notification annulant la désignation du Soudan comme État soutenant le terrorisme. La mesure est effective à compter de ce 14 décembre », a annoncé l’ambassade des États-Unis à Khartoum sur sa page Facebook.

Le secrétaire d’État Mike Pompeo a évoqué un « changement fondamental » dans les relations bilatérales et « une plus grande collaboration et un plus grand soutien à la transition historique au Soudan ».

Les États-Unis avaient imposé en 1993 ces sanctions après avoir accusé Omar el-Béchir d’entretenir des relations avec des « organisations terroristes », notamment le réseau Al-Qaïda, dont le chef Oussama ben Laden avait séjourné dans ce pays dans les années 1990.

« Dynamique positive »

Tant attendu par Khartoum, le retrait de la liste noire devrait offrir une bouffée d’oxygène à l’économie de ce pays décimée par les sanctions américaines, la mauvaise gestion et les conflits armés sous les 30 ans de règne d’Omar el-Béchir, aujourd’hui en prison.

L’inflation dépasse les 200% et le pays souffre d’une pénurie chronique de devises fortes. Les coupures d’électricité durent au moins six heures par jour. Sans oublier la crise sanitaire liée à la Covid-19.

Le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, a dit vouloir travailler avec Khartoum « pour l’aider à éponger ses arriérés auprès des institutions financières internationales ». Et l’Union européenne a loué une « étape majeure », qui offrira une « dynamique positive » pour l’économie du Soudan.

« Félicitations au peuple soudanais », a de son côté tweeté le président du Conseil de souveraineté, plus haute instance exécutive au Soudan, le général Abdel Fattah al-Burhane. « C’est une tâche qui a été accomplie par les Soudanais dans l’esprit de la révolution ».

« Nous sommes de retour au sein de la communauté internationale (…). Cela va aider le gouvernement transitoire à favoriser l’investissement et le transfert d’argent et les jeunes à trouver du travail », a commenté le Premier ministre Abdallah Hamdok.

Dédommagements

L’inscription sur la liste noire empêchait les pays étrangers de commercer et d’investir au Soudan.

En octobre, Khartoum avait nié tout « chantage » en acceptant, sous la pression américaine, d’établir des liens avec Israël. Le Soudan était alors le troisième pays arabe en moins de trois mois à annoncer un tel accord de normalisation avec Israël, après les Émirats arabes unis et Bahreïn.

Ce n’est qu’après cet accord que Donald Trump a effectivement notifié au Congrès américain le retrait du Soudan de la liste noire.

Khartoum attend cependant toujours d’obtenir l’immunité légale dans des affaires liées à des attentats passés, qui nécessite une loi au cœur des tractations au Congrès. Or, là-dessus, les négociations entre l’administration Trump et le Congrès coincent.

Cette décision s’inscrit dans un accord qui prévoit le versement par le Soudan de 335 millions de dollars de dédommagements aux familles des victimes des attentats perpétrés en 1998 par Al-Qaïda contre les ambassades des États-Unis au Kenya et en Tanzanie (plus de 200 morts), au motif que les autorités soudanaises de l’époque avaient hébergé un temps Ben Laden.

« L’entrée en vigueur d’une loi sur la paix légale qui soit acceptable pour le Soudan et les États-Unis est nécessaire pour que les fonds soient débloqués », a dit à l’AFP un porte-parole du département d’État au sujet de ces dédommagements. Il a précisé que les négociations se poursuivaient avec le Congrès.

Le Soudan a récemment exprimé son impatience, déplorant que certains « engagements politiques et économiques » n’aient « pas été respectés ». Il a prévenu que ce blocage pourrait « retarder l’application de l’accord » de normalisation avec Israël.

Les États-Unis ont renoué avec Khartoum sous l’ex-président Barack Obama, quand Omar el-Béchir a commencé à coopérer dans la lutte antiterroriste et à contribuer à la paix au Sud-Soudan. La révolte populaire qui a balayé Omar el-Béchir a accéléré le mouvement.

Josiane Mambou Loukoula

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