Enjeux politiques: la loi Tshiani sur la "congolité" toujours d'actualité

Samedi 22 Avril 2023 - 12:54

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Rejetée par l’Assemblée nationale en 2021, la proposition de loi modifiant et complétant la loi n°04/024 du 12 novembre 2004 relative à la nationalité congolaise initiée par Noël Tshiani, ancien candidat à la présidentielle de 2018, est revenue dans le débat politique.

Nonobstant la controverse qu'elle n'a cessé de susciter dans l'opinion, le bureau de la chambre basse du Parlement a cru bon d'aligner la proposition de loi relative à la nationalité congolaise parmi les sujets à traiter pendant la session en cours, au grand dam de tous ceux qui y voient un syndrome de division sur fond de séparatisme. À la veille de l’élection présidentielle de décembre 2023, la loi Tshiani, aujourd'hui portée par le député Nsingi Pululu, dérange. Le fait qu'elle vise à réserver les plus hautes fonctions de l'État, dont la présidence de la République, aux seuls compatriotes nés de père et de mère congolais, ne fait pas l'affaire de ceux qui ne se retrouvent pas dans ce registre. Toutefois, les arguments ne manquent pas pour, soit soutenir l'approche identitaire sous-jacente qu'incarne cette proposition de loi, soit pour la rejeter purement et simplement.

Dans le camp de la coalition au pouvoir, l'on évite de se prononcer clairement sur le sujet, ou mieux de donner un avis orienté, question de ménager certaines susceptibilités Un des cadres de l'Union sacrée pour la nation ne s'est pas empêché d'évoquer le droit démocratique dont aurait usé son initiateur, quitte à ce que la représentation nationale puisse trancher après un examen minutieux. Pour les plus extrémistes, cette proposition de loi pourra renforcer la souveraineté dans le contexte d'infiltration dont le pays est victime à tous les niveaux de l'État. "Nous avons besoin des Congolais de sang pûr pour diriger le Congo et assumer certaines fonctions régaliennes. Nous ne légiferons pas seulement pour aujourd'hui, mais pour le futur aussi", entend-on dire de la part des soutiens à la proposition de la loi Tshiani.

Moïse Katumbi, la principale cible?

Là où le bât blesse, c'est le fait, pour une certaine opinion, de considérer que cette proposition de loi est taillée sur mesure puisqu'elle écarte, avant terme, quelques Congolais du jeu électoral. De père juif, Moïse Katumbi, potentiel candidat à la présidentielle de décembre 2023, est présenté, à tort ou à raison, comme principalement visé. Car, une fois la loi votée, sa candidature à la présidentielle de la République pourrait être comprise. Ce que nient les pro congolité qui préfèrent s'en remettre à la sanction du peuple, seul à trancher à travers les urnes. D'où la question : être Congolais de père et de mère, est-ce un critère suffisant pour servir loyalement son pays ?

Une interrogation qui apporte l'eau au moulin des anti congolité au premier rang desquels figure le cardinal Fridolin Ambongo. Pour l'archevêque métropolitain de Kinshasa, cette proposition de loi est de nature à créer la division au sein de la société congolaise parce que comportant une germe de venin. Plutôt que de se focaliser sur l’examen d’une telle loi jugée séparatiste, xénophobe et discriminatoire, le prélat catholique invite les Congolais à se serrer les coudes pour déceler le jeu funeste des ennemis de la patrie portés par leurs velléités de balkanisation. Plusieurs mouvements citoyens craignent que ce projet de loi ne remette en cause la fragile unité nationale en générant inutilement des frustrations et des violences dont le pays n'a pas besoin à l'heure actuelle. Qu'à cela ne tienne ! Une chose est vraie, personne ne tolère qu’une loi puisse exclure une catégorie de Congolais. Il est simplement question de verrouiller l'accès aux fonctions régaliennes et non de retirer la nationalité congolaise à quiconque, explique-t-on. 

Alain Diasso

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