État d’urgence sanitaire : une année sous le prisme du coronavirus

Vendredi 2 Avril 2021 - 12:53

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Le premier cas de coronavirus au Congo a été détecté le 14 mars 2020. Depuis lors, le quotidien des Congolais n’a plus jamais été le même.  En guerre contre un ennemi invisible, mais pas des moindres, le pays subit les méfaits de la crise sanitaire, dont les conséquences économiques et sociales ont été et sont encore particulièrement dures pour la population.

À la crise économique que connaissait déjà le Congo avant l’arrivée du coronavirus s’est ajoutée la crise sanitaire et son lot de phobies. Les jours suivant l'annonce du premier cas de covid-19 sur le territoire congolais ont plongé les habitants dans une psychose. Certains citoyens, se référant aux standards des systèmes de santé des pays développés, commençaient à craindre le pire, au regard du système de santé congolais. On  entendait dans la foulée : « Si les hôpitaux dans les pays développés sont débordés, qu’en sera-t-il du Congo ? »

Redoutant d’attraper le virus en se rendant dans un centre hospitalier ou d’être diagnostiqués positifs au coronavirus, bon nombre de Congolais se sont mis à remettre à demain leurs consultations au sein des hôpitaux. D’autres ont préféré s’en remettre aux pharmaciens plutôt qu’au médecins. Ainsi pour certains cas de maladie, les gens ont préféré se rendre de préférence à la pharmacie plutôt qu’à l’hôpital, pendant que d’autres s’adonnaient à l’automédication.

Les vidéos sur la toile mettant en cause certains membres du corps médical craintifs face aux dépouilles des personnes mortes du coronavirus traduisent la peur que ce virus inspire à la population.

Une levée de boucliers

Dans sa stratégie de lutte contre le coronavirus, le gouvernement congolais a, comme bien d’autres gouvernements du monde, mis le pays sous état d’urgence sanitaire. Il a imposé des mesures barrières à la population, dans le but de stopper la propagation du virus dans le pays. Port obligatoire du masque, distanciation physique, couvre-feu, fermetures des frontières terrestres, maritimes et aériennes, puis des lieux de cultes, de divertissement, des marchés domaniaux à l’exception de quelques jours, des écoles, confinement, déconfinement… plusieurs mesures ont été prises pour gérer au mieux la crise sanitaire.

Aussi des initiatives des particuliers relatives à la fabrication des masques mais également de diffuseurs de gel hydro-alcoolique ont-elles  vu le jour dans la capitale. Par ailleurs, bien avant même que le gouvernement n’officialise sa stratégie de lutte contre la pandémie, beaucoup de Congolais avait anticipé sur les mesures barrières, en s’inspirant de celles édictées sous d’autre cieux. La maladie existe, disaient certains, il faut donc se protéger. Chacun selon son échelle sociale s’est employé à la sensibilisation et la lutte contre la covid-19.

Scepticisme

Les théories du complot, la méfiance, la désinformation ont contribué au scepticisme des Congolais face au coronavirus. Selon les avis recueillis dans la ville, ce scepticisme s’est développé dans la société, en partie parce que les autorités ne montrent pas les malades de covid-19 dans leurs lits d’hôpital, mais aussi par le relâchement des pouvoirs publics lors des rencontres officielles comme la concertation de Madingou (département de la Bouenza) et récemment pendant la campagne présidentielle.

Ce scepticisme gagne aussi du terrain vis-à-vis des vaccins contre le coronavirus.  Quelques personnes interrogées dans le cadre de cet article restent dubitatives sur le fait de se faire vacciner. Parmi les facteurs évoqués, il y a la méconnaissance des effets secondaires du vaccin. 

Résignation

Dans la mesure du possible, la population soutient les mesures barrières prônées par le gouvernement. Mais il est impossible pour certains de respecter ces mesures. C’est notamment le cas de la consigne relative à la distanciation physique. Le constat est valable dans les transports en commun, où les gens n'ont d'autres choix que de s'entasser les uns sur les autres, ou sur les places de marché où la promiscuité est tout le temps de mise.

Il faut ici se rendre à l'évidence : la population congolaise ne peut être analysée comme un tout cohérent. D’une part, l'élite et la classe moyenne ont pris à bras le corps les mesures adoptées et ont souvent porté des plaidoyers pour pousser le gouvernement à agir plus vite. Cette frange de la population a tout de suite adopté le port du masque, fait des provisions anticipant la période du confinement. Mais cette dernière, qui vit et vibre, tant soit peu à l'heure parisienne, n'est pas représentative de la vie du Congolais lambda. Ce dernier accueille ces mesures comme une double peine, car il doit faire face à des restrictions qui menacent sa survie journalière. Nombreux pensent que ces mesures sont efficaces mais qu’il faut les assouplir.

Couvre-feu, un casse-tête

D'abord effectif entre 20h et 6h du matin, puis entre 23h et 5h la semaine, 20h et 6h les week-ends, le couvre-feu est l’un des mesures qui contrarient le plus les Congolais. La question qui revient le plus souvent lorsque le sujet est abordé est  jusqu’à quand va-t-il durer ?

On note une lassitude de la population face à cette mesure qui, selon beaucoup, ne cadre pas avec la réalité que vivent les citoyens. Les opérateurs de transport en commun, les commerçants, les artistes, les sportifs, les entrepreneurs, sont parmi les plus touchés par ladite prescription. Les chauffeurs et vendeurs accusent une baisse considérable de leurs chiffres d’affaires, pendant que les artistes et sportifs crient à la relance. La 17e prorogation de l’état d’urgence sanitaire reconduisant toutes les mesures barrières, en particulier le couvre-feu a été perçu comme la goutte d’eau qui a fait déborder le vase.

Eternels optimistes

De la psychose à l’acceptation, en passant par le scepticisme et la résignation, les Congolais passent d’un état d’esprit à un autre depuis l’arrivée de la covid-19 l’année dernière. Ils espèrent que le règne du coronavirus cessera au plus vite et que la vie reprendra son cours. 

 

 

Durly Emilia Gankama

Légendes et crédits photo : 

Une prise de température à l'aéroport maya-maya DR

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