Gécamines : la chute d’un géant

Mercredi 8 Juin 2022 - 19:43

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Créé en 1906, la Générale des carrières et des mines (Gécamines) a atteint le pic de sa performance dans les années 1988, avec une production de 400 000 tonnes pour 34 000 agents. En 2020, sa production ne représentait plus que 3 000 tonnes pour 6 500 employés en direct et 1 900 en indirect. Dans un contexte déjà bien difficile pour la société minière publique, le rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) fait des observations critiques sur la gestion des actifs miniers.

En huit ans, soit entre 2000 et 2008, il y aurait eu pas moins de 24 contrats de partenariat ou joint-venture avec des privés représentant 100 % des réserves minières historiques. Le rapport note avec amertume que le géant minier n’a pu reconstituer que 26 % de ces réserves. Pourtant, cela n’a pas empêché aux gestionnaires de signer trois nouveaux contrats de joint-venture. L’autre aspect relevé dans le document concerne bien entendu les modalités de cession des actifs miniers. Globalement, elles ont connu quatre formes : l’apport des gisements en partenariat, l’amodiation (louage pour une durée déterminée), la cession des parts et droits dans les partenariats conclus et les contrats mines contre infrastructures, mieux connus sous le vocable « contrats chinois ».

Pour l’IGF, le préjudice dans les cessions d’actifs miniers est énorme. Celles-ci sont toutes caractérisées par des irrégularités. En mai 2022, un autre rapport initié cette fois par la Coalition pour la gouvernance des entreprises publiques (Cogep) a eu des mots très durs : « Aucune des cessions analysées dans cette étude n’a respecté la réglementation en matière de cession des actifs miniers qui impose le recours à l’appel d’offres concurrentiel en vue de choisir l’offre la plus avantageuse pour l’État ». Cette étude documentait des irrégularités, des pratiques de malversations financières, de corruption et de mauvaise gestion entre la Gécamines et deux de ses partenaires, en l’occurrence Metalkol et Evelyne investment SA. Dans son rapport documenté étalé sur huit années, l’IGF note aussi l’absence d’évaluation indépendante de l’apport en nature effectué par la Gécamines en partenariat. Au-delà, il y a aussi l’absence d’apport en capitaux propres de la part des partenaires de la Gécamines et l’absence de profit réalisé. Enfin, il s’indigne du manque de traçabilité du paiement des pas de porte dans certains partenariats et le défaut de publication de certains contrats de partenariats.

Dans le cas de TFM par exemple, la Gécamines avait initialement 45 % du capital social de la Joint-venture avant de baisser 17,5 % et a remonté légèrement à 20 %. Une situation anormale, selon l’IGF, qui met en lumière le fait que le gisement apporté par la Gécamines n’a pas fait l’objet d’une évaluation. L’autre contrainte est la perte d’influence notable de la société publique qui a vu baisser son pouvoir de contrôle permettant par la même occasion aux privés d’avoir la mainmise sur tous les actifs miniers. Dans l’ensemble, la Gécamines a des partenaires à 70 %, 60 % et moins de 50 %. Aujourd’hui, elle peine même à obtenir de ses partenaires le respect des lois du pays sur la sous-traitance et les assurances. A cela, l’IGF ajoute les endettements des partenaires auprès des sociétés qui leur sont apparentées et le recours massif à la sous-traitance auprès des filiales des maisons mères et des partenaires. Une affaire à suivre.   

Laurent Essolomwa

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