Golfe de Guinée : l’heure est à la formation des forces de l’ordre pour contrer la menace djihadiste

Lundi 14 Novembre 2022 - 17:30

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Les Etats côtiers dont le Bénin, le Ghana, le Togo et la Côte d’Ivoire s’inquiètent de débordements sur leurs territoires respectifs des insurrections djihadistes auxquelles le Mali, le Burkina Faso et le Niger sont aux prises depuis longtemps. 

Une récente série de raids frontaliers au Togo et au Bénin a confirmé ces craintes, poussant les Etats du golfe de Guinée à préparer leurs troupes contre d’éventuels assauts dans leurs territoires, mais aussi à renforcer leurs dispositifs pour sécuriser leurs frontières avec les pays d’Afrique de l’Ouest touchés par des attaques terroristes. 

Au Togo, par exemple, un exercice militaire de simulation d’agression djihadiste a été organisé, en octobre dernier, dans la capitale Lomé, le premier depuis un an, pour faire face aux menaces croissantes qui pèsent sur le Nord du pays. Une quarantaine de gendarmes et policiers a participé à l’exercice dirigé par deux instructeurs du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale.

Cette formation venait à point nommé, puisque le Togo a subi au moins cinq attaques terroristes, dont deux meurtrières depuis novembre 2021 dans sa partie Nord, en proie à des incursions des groupes terroristes présents de l’autre côté de sa frontière, au Burkina Faso.

Pour le ministre togolais de la Sécurité, le général Damehame Yark, l’exercice militaire qui a eu lieu obéissait aux directives du président de la République qui a « instruit » les forces de l’ordre de prendre toutes les mesures pour pouvoir faire face toute menace djihadiste. « Cet exercice mérite d’être entretenu » pour « soulager nos populations au cas où ce genre de situations se présenterait (…). Si cela arrivait dans la réalité, nous espérons ne pas avoir beaucoup de victimes », a-t-il relevé.

Le Togo a été frappé mi-juillet par une attaque sanglante menée par des « individus armés non identifiés », selon l’armée qui n’a pas communiqué de bilan précis, parlant de « plusieurs morts et quelques blessés ». Des médias locaux avaient, quant à eux, évoqué entre quinze et vingt civils tués.

Au Bénin, alors que des engagements ont été pris pour faire face aux éventuels assauts des insurgés grâce au renforcement du partenariat avec le Rwanda et la France, dans le cadre de la lutte contre le djihadisme, le groupe Etat islamique (EI) a revendiqué pour la première fois une attaque dans le Nord. Un assaut qui avait été exécuté par sa branche au Sahel, confirmant l’extension de ses activités vers le golfe de Guinée.

La progression djihadiste vers les pays côtiers doit être stoppée

« Les soldats du califat annoncent l’expansion de leurs opérations au Bénin », a affirmé, à la mi-septembre, l’organe officiel de l’EI, l’hebdomadaire "Al-Naba", cité par le centre américain de surveillance des sites djihadistes.

Al-Naba précise, à cet effet, que début juillet, les insurgés ont « attaqué une patrouille militaire dans le village de Takwara, dans la région d’Alibori (Nord Bénin) » et auraient tué quatre d’entre eux. Le lendemain, une « embuscade » de soldats dans la même région aurait cette fois fait deux morts. Notons que c’est la première fois que la branche sahélienne de l’EI revendique des activités au Bénin.

Le groupe ainsi que son grand rival Al-Qaïda multiplient, depuis des années, les attaques meurtrières au Sahel, en particulier dans le Nord du Mali, au Niger et au Burkina Faso.

En Côte d’Ivoire, les autorités redoutent que leur pays soit également visé par des incursions djihadistes. Elles se sont engagées à poursuivre la militarisation de la zone Nord malgré une relative accalmie. L’on se souvient qu’en juin 2021, plusieurs militaires avaient perdu la vie au cours des attaques terroristes. 

Depuis lors, les patrouilles ont été renforcées pour sécuriser les points stratégiques près de la frontière avec le Burkina Faso, même si le pays qui a été la cible d’attaques entre 2020-2021 n’en a plus connu depuis un an.

En raison de la persistance des attaques djihadistes dans le Sahel, la fondation allemande, Konrad Adenauer, estime qu’il est temps de prendre des mesures drastiques pour stopper leur poussée continue de cette région vers les pays côtiers et de renforcer les mécanismes de prévention de l’extrémisme. 

« La dégradation de la situation sécuritaire au Burkina Faso et au Mali fait du Nord des pays côtiers la nouvelle ligne de front contre les groupes armés opérant au Sahel », note cette organisation non gouvernementale qui rappelle que le Togo a connu sa première attaque meurtrière en mai 2022, alors que le Ghana a été  épargné jusqu’ici en dépit d’incursions et de centaines de recrutements locaux.

Ces pays ont déployé leurs armées dans le Nord depuis plusieurs années, mais un rapport du groupe de réflexion marocain, Policy center for the New South, prévient que «  militariser les frontières sera inefficace, comme ce fut le cas au Sahel ». 

 

 

 

Nestor N'Gampoula

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