Gouvernement-M23 : exigence d’un retour à la table de négociation

Mardi 6 Août 2013 - 19:20

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimableEnvoyer par courriel

Les cartes ayant radicalement changé sur le terrain militaire, les protecteurs du M23 reviennent sur le dialogue espérant sauver la rébellion du naufrage.

Jamais la Monusco n’a été aussi mal appoint. Sa cote d’amour avec la population du Nord-Kivu a nettement baissé ces dernières années. Déjà mal perçue dans l’opinion locale, la mission onusienne s’est à nouveau fourvoyée dans une affaire d’ultimatum non tenu. De son propre chef, elle a pris l’initiative d’exercer une pression sur les groupes armés à travers un ultimatum lancé aux détenteurs d’armes se retrouvant sur l’axe Goma-Sake lesquels ont été priés de se débarrasser de leurs armes endéans 48 heures. Cet ultimatum avait été pris au sérieux dans certains milieux politiques qui l’ont perçu comme un signal d’entrée en lice de la Brigade d’intervention chargée de traquer les forces négatives. D’autres, plus sceptiques, ont relativisé la portée de cette démarche qu’ils ont mise sur le compte de la diversion de la part de la Monusco.

Aujourd’hui, les faits semblent donner raison à ceux qui ont refusé d’apporter la moindre caution morale à cette initiative onusienne quoiqu'il y  ait eu tout le tintamarre médiatique qui l’avait entouré. En effet, à l’expiration de l’ultimatum, grande a été  la surprise des uns et des autres de voir la Monusco se rétracter là où on attendait qu’elle fonce sur les forces négatives pour les désarmer conformément à son mandat offensif. Cherchant à justifier l’attitude attentiste de la Monusco, son chef militaire est vite monté au créneau pour repréciser le sens de l’ultimatum qui, d’après lui, était plutôt une opportunité d’appel à la coopération et au dialogue lancée aux groupes armés qui écument l’est de la RDC. Cette requalification de la démarche de la Monusco, là où d’aucuns s’attendaient à une offensive armée de grande envergure, avait laissé de nombreux Congolais sur leur soif. De sorte qu’aujourd’hui, la déception est perceptible dans le chef des victimes de la barbarie perpétrée par le M23 et d’autres groupes armés. D’après certaines indiscrétions recueillies en haut lieu, il appert que l’ordre de stopper cette dynamique serait venu de New-York après que l’envoyée spéciale du secrétaire général de l’ONU pour les Grands lacs a fait voir à Ban Ki-moon le côté dangereux de l’opération.

Retour à la case de départ

Pour Mary Robinson, en effet, un tel engagement militaire ne servirait qu’à mettre inutilement de l’huile sur le feu alors que le gouvernement de la RDC et le M23 gagneraient en renouant avec le fil du dialogue interrompu à Kampala. Tous les protagonistes de la guerre du Kivu sont donc appelés à reprendre le chemin de Kampala qui reste la seule voie d’issue. Les cartes ayant radicalement changé sur le terrain militaire, les protecteurs du M23 reviennent sur le dialogue espérant sauver la rébellion du naufrage. Là-dessus, Ban Ki-moon reste constant dans sa prise de position consistant à trouver une solution politique à la crise de l’Est via les négociations directes entre Kinshasa et le M23. Ainsi le plaidoyer de Yoweri Museveni auprès de Mary Robinson - en sa double qualité de président en exercice de la Cirgl et de médiateur du dialogue entre le M23 et le gouvernement congolais à Kampala - aura payé. Le gouvernement et le M23 devraient dorénavant se mettre au pas en s’inscrivant dans la dynamique tracée par le dernier sommet extraordinaire de la Cirgl tenu à Nairobi au Kenya le 31 juillet. Les chefs d’État présents à cette réunion avaient astreints Kinshasa et le M23 à trouver une « conclusion rapide » aux pourparlers de Kampala.

Ce retour exigé par la Cirgl à la table des négociations entre le gouvernement et le M23 est loin de contenter la population de Goma d’autant plus que ces pourparlers n’ont jusqu’ici jamais produit d’effet en termes d’arrêt des hostilités. Neuf mois après, les deux parties continuent à tourner en rond, incapables à se mettre d’accord sur les termes du communiqué final devant sanctionner les travaux. Présentement,  nonobstant le retour annoncé du M23 sur la table des négociations, les discussions n’ont toujours pas repris.  Pour leur part, les habitants du Nord-Kivu déclarent ne rien attendre de ces pourparlers qui ne font qu’accentuer leurs misères. De plus en plus sceptiques pour la suite, de nombreuses langues commencent, dans un élan de désespoir, à retourner leur attention sur les Fardc qui, plus que jamais, passent pour une alternative crédible face aux groupes armés. À la coordination de la société civile, on est plus que jamais convaincue que la solution proviendrait des Congolais eux-mêmes et non des forces étrangères aux visées prédatrices.   

 

 

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Des délégués du M23 à Kampala