Interview: trois questions à l’abbé Blaise Armel Vivien Ndoudi sur la fête de la Nativité

Jeudi 23 Décembre 2021 - 13:58

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

La solennité de Noël 2021 tombe dans la rengaine des restrictions sanitaires liées à la covid-19 en même temps que les chants liturgiques de l’avènement du roi pacifique des chrétiens. L’abbé congolais, Blaise Armel Vivien Ndoudi, décrit cette période. Interview.

Abbé Blaise Armel Vivien NdoudiLes Dépêches de Brazzaville (L.D.B.) : Noël, la pandémie entre en concurrence avec la fête de la Nativité. Comment les chrétiens abordent-ils cette célébration ?

Abbé Blaise Armel Vivien Ndoudi (B.A.V.N.) : Avant de répondre, je tiens à préciser que Jésus n’est pas le roi pacifique des chrétiens. Il est Dieu fait homme, pour embrasser toute l’humanité et non seulement les chrétiens. La covid-19 n’enlève rien à la joie de célébrer la naissance du Christ. Au contraire, ces restrictions nous rappellent l’humilité dans laquelle le fils de Dieu est né, avec l’hygiène douteuse d’une crèche, loin des images d’Epinal que nous nous sommes faites. Noël fut d’abord une fête romaine, donc païenne, avant d’être « christianisée ». Aujourd’hui, en Occident, et même en Afrique, elle tend de plus en plus à « redevenir païenne ». Or, Noël doit être la fête, la trêve nécessaire, en ces temps de pandémie pour redonner l’Espérance. C’est au creux de l’obscurité de la nuit que le Fils de Dieu vient naître. Il le fait encore aujourd’hui au cœur des ténèbres de cette pandémie pour nous redire de ne pas perdre pied. Je me souviens du film de Christian Carion « Joyeux Noël », sorti en 2005, qui relate la trêve observée par les belligérants lors de la Noël 1914, pour fêter Noël ensemble et découvrir la tendresse en ceux qu’on considérait alors comme des monstres. Le miracle de Noël, c’est la paix. Dieu rend possible ce qui est impensable et infranchissable.

L.D.B. : Sur quoi portera votre sermon de Noël 2021 ?

B.A.V.N. : Je vais surtout parler de l’inattendu de Dieu. Dieu peut naître encore aujourd’hui, non pas dans une petite ville, mais dans le cœur des femmes et des hommes de notre temps. Entre l’interminable pandémie et la présidentielle française compliquée qui pointe à l’horizon, les chrétiens risquent d’être aux abonnés absents au moment d’accueillir le Prince de la paix. Parce que  nous risquons de l’attendre dans les palais et même les églises ou temples. La première bonne nouvelle est adressée aux bergers, ces gens « borderline » qui se trouvent en nombre dans les périphéries. C’est en les rejoignant que Noël prend tout son sens.

L.D.B. : Quels sont les rapports de la communauté congolaise de France avec la religion ?

B.A.V.N. : La communauté congolaise a un rapport ambigu avec la religion. En France, il existe plusieurs communautés chrétiennes qui font surtout dans le communautarisme. Beaucoup de Congolais ne se sentent pas à l’aise avec l’église catholique. Ils s’y sentent étrangers parce que le rapport à la foi et son expression ne sont pas les mêmes. Certaines attitudes de nos compatriotes locaux peuvent choquer quelqu’un qui vient du Congo. De même, certaines attitudes de nos compatriotes peuvent choquer les gens d’ici. Il faut trouver le bon équilibre. C’est le défi de la diversité. Aussi faut-il signaler que nous avons un rapport un peu commercial avec Dieu. Nous avons perdu la gratuité de la foi : on prie pour obtenir quelque chose, dans une attitude très égoïste. La multiplication des pasteurs n’arrange pas non plus la situation parce que leurs prédications tournent autour de la réussite matérielle et de la méfiance qui est de plus en plus grandissante dans les familles. Tout cela est bien éloigné du message du Christ.

Propos recueillis par Marie Alfred Ngoma

Légendes et crédits photo : 

Photo : L'abbé Blaise Armel Vivien Ndoudi

Notification: 

Non