Musique : Evoloko « Jocker » veut se remettre au goût du jour

Vendredi 18 Décembre 2015 - 21:03

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Après un long passage à vide, Antoine Evoloko Bitumba Bolay Ngoy alias Anto Nickel veut reconquérir les cœurs des mélomanes.

Un retour à la Zorro qui s’apparente à un challenge personnel pour cet artiste d’exception dont les hauts faits artistiques moisissent aujourd’hui dans les méandres de l‘oubli. Il faudrait interroger l’histoire pour mieux comprendre le personnage et le jauger. L’heure est venue d’exhumer le talent artistique inné qu’incarne cette star adulée d’autrefois et qui porte, malgré lui, les stigmates de l’usure. A la manœuvre de la régénérescence artistique du vieux « Atshuamo » se trouvent quelques bienfaiteurs dont le bourgmestre de la commune de Kalamu Jean Claude Kadima qui n’hésite pas à puiser dans sa tirelire de quoi soutenir l’artiste. Un album est déjà dans le box. Il s’intitule « Déjà déjà ». Présenté dernièrement à la presse, cet opus de sept titres contient des thématiques variées mettant en relief la voix limpide de ce chanteur ténor émérite se réclamant de l’école Fiesta. Il survole les titres en restituant dans l’air du temps deux anciens tubes dont « Mi amor » du seigneur Tabu Ley rendu avec brio.

Tout en sachant que la tâche ne sera pas facile pour se hisser à nouveau sur son piédestal après plus de dix ans d’immobilisme, Evoloko dit la « Carte qui gagne » entend s’armer de courage et d’abnégation. Beaucoup des choses ont changé dans l’espace musical et il le sait. Il veut se mettre au goût du jour en faisant l’effort de réadaptation. Pour ce faire, il tient à se dépouiller du vieil homme à travers son nouvel album qui consacre une régénération à tout point de vue. Finis les bouderies, l’arrogance et le repli sur soi qui lui sont généralement imputés. « Tout ceci ne m’ont rien apporté », confesse-t-il sous une pointe d’amertume. Cette phrase sibylline dissimule mal les regrets d’une star qui n’a pas su profiter de son succès, ni tirer les dividendes d’une carrière pourtant prolifique et promue à bel avenir.

Face à ses pairs de la génération Zaïko dont il fait partie, Evoloko apparait comme un éternel perdant. Il a, en effet, perdu le combat de la gloire alors qu’il était mieux loti que quiconque en terme de prédispositions naturelles. Sa vie artistique est à la fois riche et vide de sens. Le contraste est, en effet, frappant entre son niveau de célébrité d’antan et la précarité existentielle qui l’aura caractérisé ces dernières années. « Déjà déjà » devrait donc rompre avec ce dissemblance pour asseoir véritablement une autre image d’Evoloko plus requinquée et remodelée à la sauce des nouvelles tendances.   

En 1969, lorsque le groupe Zaïko Langa Langa est créé, il a à peine quatorze ans. Le succès a donc visité précocement le cadet qu’il était à côté des vieux briscards tels que Papa Wemba, Nyoka Longo, Mavuela Somo, Manuaku Waku etc. De 1970 à 1975, Evoloko s’est imposé comme le leader incontesté du collectif en signant la première cuvée des chansons à succès telles que « Francine Keller », « Charlotte adieu n’Athenée », « Ami Bakumba », « Onassiss », « Mbeya Mbeya » etc. Révoqué en 1974 pour indiscipline, il créa en compagnie de Jules Shungu, Siméon Mavuela et Bozi Biziana l’orchestre Isifi avant de regagner Zaïko en 1979. Un retour marqué par « Fièvre Mondo » - un des bestsellers de son riche répertoire - mais malheureusement écourté par l’appât à lui tendu par Verckys Kiamwangana qui l’embarqua en 1981 dans une nouvelle aventure avec Langa Langa stars, un groupe qui ne fera pas long feu.

De 1986 à 1989, Evoloko s'employa, sans grand succès, à sauver ce qui restait de Langa Langa Stars après le départ de ceux qui en constituaient l’ossature. Harassé, il finit par s’exiler en France où il rencontra Souzi Kaseya avec lequel il peaufina un projet d’album. « Mbonge » sorti en 1989 sur le registre World music restera sans doute l’œuvre dans laquelle l’artiste s’est exprimé comme il ne l’avait jamais fait auparavant.  

Malgré toutes les contraintes musicales ayant jalonné sa carrière artistique,  Evoloko est loin de s’avouer vaincu. Il reste et demeure toujours compétitif comme le démontre la sortie de « Déjà déjà » qui dément les mauvaises prédictions à son sujet.

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Evoloko Atshuamo

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