1ère journée "Cancer en Afrique" : Trois questions aux Professeurs Jean-Bernard Nkoua Mbon et Judith Nsonde Malanda

Mardi 3 Février 2015 - 19:51

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Les Professeurs Jean-Bernard Nkoua Mbon et Judith Nsonde Malanda étaient en délégation à Paris avec le Pr. Charles Gombe Malawa. Ils y ont participé à la 1ère journée "Cancer en Afrique" organisée le mardi 3 févier au Palais des Congrès par l’Hôpital américain. Le Professeur Nsonde Malanda, première diplomée du DES de Brazzaville, est l’une des neuf femmes formées à la cancérologie sur le continent. Entretien.

Le Professeur Jean-Bernard Nkoua Mbon (au centre) et le Professeur Judith Nsonde Malanda (à droite) ©Adiac

Quelle est l’évolution du nombre de cas de cancer au Congo ?

Professeur Jean-Bernard Nkoua Mbon : On voit qu’année après année la fréquence augmente. C’est une fréquence relative qui ne concerne que la ville de Brazzaville étant donné qu’il n’existe pas de statistiques pour l’intérieur du pays. À Brazzaville, il y a, chaque année, entre 500 et 600 nouveaux cas de cancer. Dans les années à venir ce chiffre est amené à augmenter. Le cancer du poumon qui n’est pas encore un problème de santé publique chez nous va le devenir en raison du changement des habitudes de vie : les jeunes gens fument de plus en plus tôt et avec l’augmentation de l’espérance de vie, il faut s’attendre à une forte croissance de ce type de cancer à l’avenir. Avec le SIDA, ainsi que les virus de l’Hépatite B et C, il faut également anticiper une augmentation des cancers viro-induits (provoqués par des virus), essentiellement des cancers du foie.

Quels types de cancers sont les plus fréquents au Congo ?

Professeur Jean-Bernard Nkoua Mbon : La cartographie des cancers au Congo est différente de celle de la France. Chez la femme, le premier cancer est le cancer du sein suivi du cancer du col de l’utérus, alors qu’en Europe le cancer du col de l’utérus a quasiment disparu grâce à la prévention et à la vaccination. Chez les hommes, en Europe il y a une plus grande occurrence de cancers du colon et de la prostate. Au Congo, c’est le cancer du foie qui est le plus fréquent. Cependant avec l’allongement de l’espérance de vie, le cancer de la prostate devient également préoccupant chez nous. Enfin les cancers de l’enfant ne sont pas principalement les cancers hématopoïétiques tels que les leucémies, mais plutôt les cancers du rein, de la rétine et plus rarement les cancers des os.

Quels efforts de prévention et de dépistage peut-on faire au pays afin que, comme en Europe, les cancers de la femme diminuent ? Les structures hospitalières du pays sont-elles équipées en conséquence ?
 

Professeur Judith Nsonde Malanda : En tant que vice-présidente de l’Organisation africaine pour la recherche et l’enseignement sur le cancer, j’ai organisé, en octobre dernier à Brazzaville, une marche pour la lutte contre le cancer chez la femme. Dans les hôpitaux de Brazzaville, il existe des activités de prévention contre le cancer du col de l’utérus. Aujourd’hui, pour ce type de cancer, il est possible de réaliser des dépistages au moyen de tests visuels. Les services de cancérologie et de gynéco-obstétrique du CHU de Brazzaville sont équipés de colposcopes pour établir les diagnostiques. Les moyens pour traiter les lésions pré-cancéreuses, de type dysplasies grade 1,2, et 3 existent. Ce qu’il reste à organiser aujourd’hui, c’est le dépistage du cancer du sein qui va nécessiter un plateau technique un peu plus étoffé car il faut des radiologues, du matériel, ainsi que des mesures d’accompagnement pour le traitement des lésions qui seront dépistées.

 

Propos recueillis par Rose-Marie Bouboutou

Légendes et crédits photo : 

Le Professeur Jean-Bernard Nkoua Mbon (au centre) et le Professeur Judith Nsonde Malanda (à droite) ©Adiac