Grande muraille verte : inclure les communautés dans le processus

Mercredi 10 Mars 2021 - 12:00

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A cause des évolutions climatiques, l'Afrique subsaharienne est confrontée à des défis multiples, souvent interconnectés : la sécurité alimentaire et hydrique, la réduction de la dégradation des terres, la gestion durable des ressources naturelles et des écosystèmes ou encore la réduction de l'extrême pauvreté.

Des enjeux qui risquent d'être exacerbés par l'augmentation de la population - de 1,4 milliard d'ici à 2030 et de 2,1 milliards d'ici 2050. Au cœur du continent s'étend une vaste région tropicale aride et demi-aride appelée Sahel, qui traverse les pays bordant le sud du Sahara du Sénégal à Djibouti. Dans cette zone, 2/3 de la population vivent de la production animale et végétale. « Sur le plan environnemental, la hausse des températures et la modification des régimes de précipitations tendent à y exacerber les aléas environnementaux, accélérer la désertification, compromettre la sécurité alimentaire et accroître la dégradation de la biodiversité et des services éco systémiques», a expliqué Sougueh Cheik, de l'Institut de recherche pour le développement (IRD). Les sécheresses sont devenues une urgence prioritaire dans la région. La désertification touche 45% de la superficie et concerne 500 millions de personnes.

La désertification, une grande menace pour le Sahel

Le sahel est sous la menace de la désertification, pourtant il dépend de l'agriculture et du pastoralisme. A cela s'ajoutent des facteurs anthropiques (urbanisation, surexploitation des sols, feux de brousse et surpâturage), et un niveau élevé de pauvreté, une croissance démographique rapide et des conflits. Des défis multidimensionnels et interdépendants qui se heurtent à la faible capacité d’adaptation des systèmes socio-économiques. Au sahel 30 millions de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire, dont 9,4 millions susceptibles de connaître des  déficits alimentaires extrêmes. Une situation qui appelle à faire de « l'adaptation une priorité de la politique climatique », selon Sougueh Cheik. Mais des progrès ont été réalisés, notamment grâce à la mise en place de fonds d’adaptation à travers la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), l’élaboration de programmes d’action nationaux et régionaux d’adaptation et l’intégration de cette dimension aux projets de développement. La Grande muraille verte en est un exemple emblématique.

Barrière verte contre l’avancée du désert, face à 100 millions d'ha dégradées à restaurer

L'idée de « résister à l'avancée perçue du désert du Sahara n’est pas nouvelle » par un barrage vert. L'idée de la Grande muraille verte vise à stopper la désertification et la dégradation des terres dans la zone sahélienne et à améliorer les moyens de subsistance des petits exploitants agricoles et des éleveurs de la région. La première étape consiste en la plantation d’une bande forestière de 7000 km de long et de 15 km de large qui traverserait le continent africain du Sénégal à Djibouti, le long de la limite sud du désert du Sahara (Sénégal, Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger, Nigeria, Soudan, Ethiopie, Erythrée, Djibouti). L’initiative de la Grande muraille verte a réuni les pays africains et les partenaires internationaux dans un projet qui a pour ambition de restaurer 100 millions d’hectares de terres dégradées, de séquestrer 250 millions de tonnes de carbone et de créer 10 millions d'emplois d'ici 2030. Sur les 100 millions d’hectares prévus pour 2030, 4 millions d'hectares ont été restaurés à ce jour.

Inclure les communautés dans le processus

Au regard de la complexité des défis, « le succès d’une telle initiative est fortement tributaire d’une pacification de la région et d’une meilleure appropriation du projet par les communautés locales à travers une approche plus inclusive », a souligné Sougueh Cheik , avec un défi, « l’identification des zones propices au boisement et/ou aux pratiques agricoles ». Selon une étude récente, 43,5 % de la superficie du Sahel et 25,6 % de celle de la zone proposée pour la Grande muraille verte ne sont pas propices à une plantation durable. Sougueh Cheik appelle à « combiner la plantation d’espèces d’arbres bien choisies avec d’autres formes d’utilisation des terres (cultures, pâturages, cueillette, etc.), ce qui nécessite un cadre foncier et juridique. Il serait enfin important de mieux concilier les connaissances scientifiques et les savoirs traditionnels des populations locales pour trouver les meilleures solutions grâce à des approches participatives et novatrices de restauration de terres dégradées ».

Noël Ndong

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