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La deuxième Facilité élargie de crédit du FMI pour le Congo: une affaire de confiance

Mercredi 9 Février 2022 - 11:15

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Le Conseil d'administration du Fonds monétaire international (FMI) a approuvé, le 21 janvier 2022, pour la deuxième fois en trois ans, un nouvel accord de trente-six mois au titre de la Facilité élargie de crédit (FEC) pour le Congo, d'un montant de 324 millions de Droits de tirages spéciaux (DTS), équivalent à 456 millions $, avec un décaissement immédiat de près de 90 millions $. Membre du FMI depuis le 10 juillet 1963, le Congo dispose d’un quota total de 162 millions de DTS et d’un encours de crédits de 26,00 millions de DTS auprès de cette institution. A quoi peuvent servir ces fonds et sous quelles conditions?

En effet, ce prêt est généralement accordé aux membres du FMI qui connaissent des déséquilibres prolongés de leur balance des paiements. Mais, il peut également être octroyé pour réduire les vulnérabilités liées à la dette, au déficit budgétaire, aux déséquilibres structurels, aux pertes conjoncturelles liées aux chocs pandémiques, à la lutte contre la corruption, au renforcement de la transparence dans l'utilisation des ressources publiques et à l’amélioration du climat des affaires.

Dans le cas du Congo qui, en décembre 2021, était confronté à une dette équivalente à 94% de son Produit intérieur brut (PIB), largement au-dessus de la norme autorisée par la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cémac) de 70% du PIB, le FMI avait jugé soutenable cet endettement, en raison de l’apparition des signes de la maîtrise des vulnérabilités. Ce qui n’était pas le cas, le 17 juillet 2019, lorsque la dette du Congo représentait 110% du PIB et que les deux parties avaient signé la première FEC de 448,6 millions $ sur trois ans, après deux années de laborieuses négociations, sans parvenir à intégrer efficacement ces vulnérabilités, rendant immédiatement caduque l’arrangement.

Certes, après le décaissement de la première tranche de 44,9 millions $ de cette première FEC, le communiqué de presse du FMI de janvier 2020 avait révisé la croissance du Congo à la baisse à 2,2% pour 2019, à cause de l’expansion moins forte que prévue de la production pétrolière. À partir de 2020, la baisse de cette production s’aggravait à mesure que les champs de pétrole atteignaient leur maturité. La chute du cours mondial du pétrole entre 2013 et 2017, au rythme moyen de 15,5% l’an, soit 49% sur toute la période, a entraîné une baisse de la croissance de l’activité économique du Congo de -10% en 2016. 

Dans ces conditions, il était impossible d’appliquer les quarante-huit conditionnalités de la première FEC. Cette dernière s’inscrivait dans le cadre de la couverture du besoin de financement des États de la Cémac entre 2017 et 2020, pour 10 284 Md$ dont 30% étaient financés par le FMI, 15% par la restructuration de la dette et 55% par d’autres institutions financières internationales. Durant ce temps, les autres États de la Cémac avaient encaissé leur FEC et amélioré progressivement les déséquilibres de leur balance de paiements.

Par conséquent, la soutenabilité actuelle de la dette du Congo signifie que le pays maîtrise mieux ses points faibles persistants, notamment l’instabilité macroéconomique, les déficits liés à la reprise économique dans le contexte de la pandémie de la covid-19, la faible contribution à l'effort régional de restauration et de préservation de la stabilité extérieure de la Cémac.

Dès lors, la prévision du FMI d’une croissance de 2,4% pour cette année après une contraction de 0,2%  du Produit national brut (PNB) en 2021, confirme cette lente, mais réelle reprise de l’activité économique du Congo. Ce qui permet de lancer les activités structurantes dans l’agriculture, le numérique, le tourisme, l’immobilier, l’industrie et les zones économiques spéciales, prévues dans le cadre du Plan national de développement 2022-2026 de plus de 8 987 Mds FCFA.

La nouvelle FEC contribue au financement de ces activités jusqu’à 41,5% du total des ressources extérieures du PNB. Le financement par l’État n’étant que de 24%, les autres ressources proviendront des partenaires à mobiliser dont l’implication dépendra du degré de confiance qu’ils auront retrouvé pour accompagner les autorités congolaises.

Ainsi, le FMI vient de donner un signal fort qui relance l’ouverture du guichet et permet aux partenaires financiers du Congo d’engager les investissements directs étrangers, afin que le pays retrouve sa trajectoire de développement économique. A condition toutefois, que l'utilisation des ressources contribue à la réduction de la dette, à l’amélioration du climat des affaires, à l’équilibre de la balance de paiements et que les acteurs s’impliquent davantage dans une gouvernance inclusive et responsable de l’État.

Emmanuel Okamba, maître de conférences HDR en Sciences de gestio

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