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Mahamat Idriss Déby à Paris

Samedi 10 Juillet 2021 - 18:45

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Première sortie officielle à Niamey, au Niger, le 10 mai, deuxième sortie, le 14 mai, à Abuja, au Nigeria, troisième, le 4 juillet, à Paris, en France. Le président de la transition tchadienne, le général Mahamat Idriss Déby, est à sa troisième visite hors de son pays, depuis son installation au pouvoir à la suite de la disparition tragique de son père, le président Idriss Déby Itno, le 20 avril dernier, lors d’opérations militaires contre les rebelles du FACT, le Front pour l’alternance et la concorde au Tchad.

Dans la capitale nigérienne, le chef de l’Etat tchadien était allé s’enquérir de la situation sur le terrain du fait notamment de la présence signalée de certains leaders de la rébellion du FACT dans ce pays voisin. Il avait ainsi rencontré son homologue, le président Mohamed Bazoum, désigné facilitateur entre les insurgés et le nouveau régime de N’Djamena. On peut retenir que depuis, les bruits de bottes imputés à cette rébellion que les militaires du Tchad donnent défaite ne sont plus perçus.

Chez l’autre voisin nigérian, Mahamat Idriss Déby a obtenu de son hôte, le président Muhammadu Buhari, les assurances que leurs deux pays poursuivront de concert leur engagement contre les groupes terroristes qui sévissent à leurs frontières communes, en particulier dans le bassin du Lac Tchad. L’on se souvient des incursions répétées des hommes de la secte Boko Haram dans cette zone avec, à chaque fois, une riposte vigoureuse des forces régulières tchadiennes.  

Depuis qu’il est en place à N’Djamena, le Conseil militaire de transition semble regarder manifestement vers l’Afrique de l’Ouest. Pour des raisons sécuritaires évoquées plus haut, cela va sans dire. A l’heure qu’il est et tenant compte du déploiement d’un fort contingent de soldats tchadiens (1200 hommes) dans les effectifs du G-5 Sahel, fixer l'horizon d'où vient le danger parait convenable. Cela ne signifie donc pas, même si l’on peut spéculer, que le Tchad tourne le dos à son espace communautaire, la sous-région d’Afrique centrale.

Le 4 juin passé, Brazzaville réunissait un sommet dédié à la situation intérieure de ce pays, auquel prenait part le Premier ministre tchadien, Albert Pahimi Padacké, au nom du chef de l’Etat. Peut-être que ce dernier aurait pu profiter de cette occasion pour rencontrer et échanger avec ses homologues Denis Sassou N’Guesso, Joao Lourenço, Faustin Archange Touadéra, Félix Tshisekedi ainsi qu’avec les nombreuses délégations présentes dans la capitale congolaise. Dans une lettre adressée à l’initiateur du sommet, le dirigeant tchadien avait invoqué des impératifs sécuritaires pour expliquer son absence mais s'était montré reconnaissant à Denis Sassou N'Guesso. La rencontre avec l’Afrique centrale et l’Union africaine n’est que partie remise, si on peut dire.

Et pourquoi Paris ? Les médias de l’Hexagone ont annoncé une réception « discrète » à l’Elysée entre Mahamat Idriss Déby et Emmanuel Macron. Pourtant l’essentiel est fait. La France a annoncé à cette occasion le déblocage d’une « nouvelle aide budgétaire » au Tchad. En tout état de cause, la relation entre Paris et N’Djamena n’a pas été affectée par les événements ayant entraîné la disparition du maréchal Idriss Déby. La France, par l’intermédiaire de son ambassadeur sur place, Bertrand Cochery, a été le premier pays à rencontrer le général Mahamat Idriss Déby quand celui-ci venait fraichement de s'intaller au Palais présidentiel dans ses nouvelles fonctions de chef de la junte au pouvoir.

Il est question pour la France de consolider le lien construit de longue date avec le Tchad, et de s’assurer que N’Djamena maintiendra ses troupes dans la dynamique du G5 Sahel à l’heure où la force Barkhane, sur le départ dans son format actuel, se réoriente stratégiquement. Il est une autre garantie que le Tchad, avec l'aide de ses amis, devra donner à la communauté internationale: faire que par le dialogue les acteurs du pays parviennent à organiser des élections inclusives à la fin de la transition si elle ne glisse pas.

Pour tout dire, la caution pour sortir du régime d'exception actuel, les Tchadiens seuls sont en mesure de l’offrir. Chaque fois en effet qu'un pays connait les difficultés de parcours comme l'est le Tchad aujourd'hui, en fonction de leurs intérêts, et quels qu’en soient les cas de figure, les partenaires lointains ou proches, anciens ou nouveaux, assidus ou opportunistes, savent chacun marquer son périmètre en ayant à cœur de préserver les siens en fonction des moyens dont il dispose et des aptitudes qui sont les siennes. Observons !

Gankama N'Siah

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