Portrait : qui sont les indépendantistes afro-vénézuéliens ?

Samedi 17 Mai 2014 - 1:15

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Ces messieurs et dames ont marqué l’histoire du Venezuela. En guise de reconnaissance du combat qu’ils ont mené à partir de 1795 pour l’indépendance et la souveraineté du Venezuela, le président Hugo Chavez-Frias, président de la cinquième République vénézuélienne, adepte de la doctrine de Simon Bolivar et du socialisme, a décrété dès 2005 le 10 mai « Journée afro-vénézuélienne ». Au Congo, cette journée a été célébrée par l’ouverture d’une exposition photos de ces afro-descendants. Qui sont-ils ?

Sur le mur d’une salle de cours au lycée Joseph-Chaminade de Brazzaville, où cette exposition a pris ses quartiers, on peut voir et lire certains grands noms, comme celui de José-Leonardo Chirino. En effet, ce métis révolutionnaire de l’État de Falcon est né le 25 avril 1754. C’est en 1795 qu’il a conduit l’insurrection qui réclamait des droits civils et républicains dans la sierra San-Luis. Malheureusement pour lui, le 10 décembre 1796, il fut exécuté par l’Espagne. Sa tête et ses mains furent exhibées au public afin de décourager ceux qui luttaient pour la même cause.  Le 10 mai 1995, une plaque commémorative fut posée au Panthéon national pour le reconnaître en tant que précurseur de l’indépendance.   

Outre José-Leonardo Chirino, il y a eu également Matea Bolivar. Née le 21septembre 1773 à San José de Tiznados, cette ressortissante de l’État de Guárico, d’origine africaine, fut la première maîtresse du libérateur Simon Bolivar. Elle a accompagné Maria Antonia Bolivar pendant son exil et participa à quelques batailles du libérateur, dont San Mateo. Matea Bolivar a été une fontaine de consultation de l’histoire du Venezuela à cause de son âge. Elle est morte le 21mars 1866, et est enterrée à côté de la famille du libérateur.

Après sa mort, un autre indépendantiste du nom de José Ascension Farreras, de l’État de Bolivar a surgi. Né à Angostura, le 27 août 1785, ce descendant d’Africains a abandonné les forces loyalistes en 1817 et a participé à la bataille de San Felix, qui a servi à libérer la région de Guyana. José Ascension Farreras a lutté à côté de Bolivar et de Sucre. En 1828, il obtint le grade de colonel et, en 1861, il est promu par Juan-Crisostomo Falcon au grade de général de division, avant de trouver la mort le 18 janvier 1865.

Dans la même période, José-Joaquin Veroes, de l’État de Yaracuy, né à San-Felipe en 1789, mène lui aussi le même combat. Parti de l’armée en faveur de l’indépendance, où il a participé aux campagnes de guerre de la première et la deuxième républiques (1811-1814). Il fut emprisonné durant cinq ans (1815-1820) à Puerto Cabello et à Cartagena de Indias. Il s’est enfui et s’est joint aux forces du colonel Mariano Montilla qui se sont battus en Colombie et au Pérou. Il a lutté contre les royalistes à Santa Marta et à Cartagena de 1821 à 1823. À mort, en 1855, il avait obtenu le garde de colonel.

Hipolita Bolivar, de l’État d'Aragua, est la célèbre héroïne africaine née à San Mateo en 1793. Mère allaitante de Simon Bolivar, elle l'a accompagné pendant son enfance et sa jeunesse. Bolivar la considérait comme sa mère et son père. Il s’est occupé d’Hipolita et de ses enfants, même en son absence. Sa dépouille mortelle repose dans la cathédrale de Caracas, à côté de Matea, son amie inséparable et alliée.

Inès Maria Páez, de l’État de Carabobo, était mariée avec un mantuano (aristocrate) et fut mise en accusation car elle avait osé utiliser un tapis pour s’agenouiller pendant la messe, ce qui était le privilège exclusif des femmes aristocrates. Elle fut défendue par Juan-German Roscio-Nieves, dont les arguments ont fait que la Real Audiencia Espanola donna raison à Ines Maria. Il s’agit du premier procès judiciaire contre la discrimination, ce qui constitue le début de la défense des droits civils en Amérique.

Une autre indépendantiste, pas des moindres, est Francisca Paula Aguado. De l’État de Miranda, elle était une esclave de la mantuana (aristocrate) Gertrudis Aguado, qui lui a accordé la charte de liberté le 12 janvier 1798, à condition que Francisca soit à ses côtés jusqu’à sa mort. L’héritier de Gertrudis, Miguel del Toro, a refusé de donner la liberté à Francisca, mais elle gagna un procès judiciaire contre lui, qui a duré du 7 juillet 1800 au 9 août 1801. C’est ainsi qu’elle remporta un triomphe juridique important dans le cadre de la lutte contre l’esclavage.

Il n’y a pas eu que Francisca Paula Aguado de l’État de Miranda. Un autre est Miguel Geronimo, dit Guacamaya, un Africain esclave qui entre 1794 et 1795 a conduit, avec Maria-Conception Sanchez, le Cumbe de Taguaza, dans la communauté Araguita, à Barlovento. Dans ce Cumbe, la force des Cimarrons, très bien organisés, réclamait la liberté, ce qui a donné origine à une importante rébellion au Venezuela à la fin du XVIIIe siècle.

L’État d'Apure n’a pas été en marge de ce mouvement. Il y eut dans cet État le nommé Pedro Camejo, dit Negro Primero, né à San Juan de Payara, réduit à l'esclavage. Son maître lui a permis de s’enrôler dans l’armée des royalistes. Après la bataille d'El Yagual, il a adhéré à la cause de l’indépendance, conduite par José-Antonio Paez. Il s’est battu en diverses batailles militaires. Pedro Camejo est l’un des héros de la bataille de Las Queseras del Medio en 1819 et de la bataille de Carabobo en 1821, où il est mort.

José-Tomas Leon, de l'État d'Aragua, était lui aussi un esclave dans une exploitation agricole et un moulin de canne à sucre à La Victoria. Il adhère à l’armée des patriotes en 1818. José-Tomas Leon a participé aux batailles La Puerta, Ortiz, El Rincon de los Toros et Carabobo, entre autres. Il a aussi fait partie des campagnes de libération de Colombie et du Pérou. En 1839, il a gagné un procès contre le fils d’Eustaquio Machado, son ancien maître, qui voulait réduire Leon à l'esclavage de nouveau.

Marta Cumbale de l’État de Sucre, est une des lutteuses pour l’émancipation du Venezuela. Elle vient d’une famille de descendants africains réduits à l'esclavage. Elle s’est battue sur les champs de Chaguaramal, ainsi qu’en cinq batailles livrées aux champs de la ville de Maturin. Elle s’est distinguée en tant qu’infirmière bénévole durant la guerre. Néanmoins, elle est toujours restée anonyme, personne n’a reconnu ses contributions à la lutte qui a fait d’elle une vraie héroïne.

Enfin, Leonardo Infante, de l'État de Monagas, né à Chaguaramal, est d’origine africaine. Il a participé à la première bataille de Carabobo, à Las Queseras del Medio, à Pantano de Vargas, à Boyacá et à Rincon de Los Toros, où il a sauvé Simon Bolivar. Leonardo Infantile fut erronément accusé à Bogota de l’assassinat du lieutenant Francisco Perdomo. Il a été condamné à mort par fusillade le 26 mars 1825 par Francisco de Paula Santander.

Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Photo 1 : José Ascension Farreras. (© DR) ; Photo 2 : Hipolita Bolivar. (© DR) ; Photo 3 : Pedro Camejo. (© DR)