Religion : tuées au Burundi, les trois religieuses italiennes ont été enterrées au Congo

Jeudi 11 Septembre 2014 - 19:10

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Les missionnaires assassinées avaient choisi de reposer à Bukavu, en signe de don d’elles-mêmes à une Afrique qu’elles aimaient.

Il n’y a pas signe plus parlant que le symbole du lieu de sépulture choisi pour (et par) les trois missionnaires xavériennes italiennes assassinées dimanche soir dans leur couvent de Kamenge, à Bujumbura, au Burundi. Par amour pour cette Afrique à laquelle elles avaient décidé de dédier leurs forces et leur engagement de femmes d’Église, Sœur Bernadetta Boggian, Sœur Lucia Pulici et Sœur Olga Raschietti reposent, depuis le 11 septembre, au cimetière missionnaire de Panzi, dans l’archidiocèse de Bukavu, en République démocratique du Congo.

Après la messe émouvante de mercredi à Bujumbura, en présence de centaines de fidèles en larmes, du corps diplomatique et des autorités gouvernementales burundaises, les trois cercueils ont rejoint la RDC  jeudi. Ils sont passés, suivant le programme, par la mission de Luvungi où beaucoup de missionnaires ont œuvré. À Bujumbura mercredi, l’envoyé du président Pierre Nkurunziza, le vice-président burundais Prosper Bazombanza s’était dit « absolument révolté par la barbarie » de ces assassinats.

Depuis le début de la semaine et l’annonce de la bouleversante nouvelle, ce sentiment a habité aussi bon nombre d’Italiens qui n’ont pas compris le sens de ce geste fou. Dans les colonnes des journaux se sont multipliés les avis des citoyens ordinaires relevant que la terre de Kamenge récompensait bien mal la générosité de trois vieilles missionnaires. Suivant les dernières informations à Bujumbura, l’assassin des trois sœurs – qui auraient toutes été violées – serait un jeune du quartier, un certain Christian-Claude Butoyi.

Il s’agit d’un Burundais âgé de 33 ans passés pour l’essentiel en République démocratique du Congo d’où il ne serait rentré qu’il y a 8 ans. Le mobile de son geste reste aussi confus que la violence avec laquelle il s’est acharné sur ses victimes : une décapitée à la machette, l’autre a eu la tête fracassée à coups de pierre alors que la troisième semble avoir été étouffée. Aux enquêteurs, Butoyi aurait expliqué qu’il a voulu se venger de la perte d’un terrain, le couvent xavérien de Kamenge ayant été bâti sur un espace, propriété de sa famille selon ses dires. Mais très peu croient en une telle fable.

Les religieuses avaient leurs papiers de propriété en règle. Elles étaient insérées dans un quartier jadis marqué par la violence juvénile mais qui est retourné aujourd’hui, grâce à des programmes juvéniles adaptés, à la normalité. Pour les Burundais, l’action de l’Église est de beaucoup dans le retour à la normalité de Kamenge, naguère « quartier chaud ». C’est pourquoi le président de la Conférence épiscopale, Mgr Gervais Banshimiyubusa, veut comprendre. Il réclame une commission d’enquête indépendante « pour faire la pleine lumière sur ces faits tragiques » et certifier que Butoyi a bien agi seul comme il l’a prétendu lors des interrogatoires.

En Italie, la douleur pour la mort des trois missionnaires s’est traduite par un « deuil citoyen » dans la localité de Montecchio-Majeur, près de Parme, où Sœur Olga avait vu le jour il y a 80 ans. Les drapeaux y ont été mis en berne depuis mardi. Pour sa part, la ministre italienne des Affaires étrangères Federica Mogherini (devenue entre-temps commissaire européenne aux Relations extérieures), ce triple assassinat est déplorable car il s’ajoute « aux attaques contre les chrétiens qui, en maints endroits du monde, tendent à se transformer en phénomènes dramatiques ».

Lucien Mpama