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Rivalités politiques et démocratie

Lundi 31 Mars 2014 - 0:18

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En veilleuse depuis deux ans, l’arène politique du Congo-Brazzaville va entrer en ébullition dans quelques semaines, peut-être dans quelques mois. L’échéance future la plus proche concerne les élections locales pour lesquelles les opérations de recensement, loin de faire l’unanimité des acteurs en présence, poursuivent néanmoins leur petit bonhomme de chemin. D’ici là, cela va sans dire, les partis et les électeurs potentiels seront fixés sur les dates de ces rendez-vous essentiels à la vie des collectivités, temps par excellence d’apprentissage et d’exercice de la démocratie de proximité.

À l’évidence, on s’attend à la résurgence des rivalités anciennes révélées depuis l’avènement de la démocratie au Congo il y a deux décennies. Bien souvent, même entre alliés supposés, ces antagonismes se radicalisent autour des fiefs traditionnels de telle ou telle formation politique. Appelons les choses par leur nom en sillonnant les coins du Congo où, sur la foi de l’histoire récente de notre pays, les batailles électorales prenant appui sur la revendication de la terre natale du leader du parti en compétition ont laissé des empreintes.

Cuvette : le Parti congolais du travail (PCT) et le Rassemblement pour la démocratie et le développement (RDD) avaient beau être en alliance depuis quelques années, l’une et l’autre formation politique ne s’empêcheront pas, au cours des prochaines élections locales, d’œuvrer à ce que son escarcelle soit la mieux remplie. Ils ne l’ont pas moins expérimenté en 2012, notamment à Owando, le chef-lieu du département, laissant dire aux observateurs qu’en termes de fief, l’ex-Fort-Rousset, d’où viennent Marien Ngouabi et Yhombi-Opanga, fondateurs respectifs des deux partis, ils se le partagent à tour de rôle. Sauf que pour le RDD qui en fit sa citadelle imprenable en 1992, il y a bien longtemps qu’il a perdu la main.

Pool : le Mouvement congolais pour la démocratie et le développement intégral avait longtemps vécu seul dans ce département. Pardon, il était talonné, mais de très loin, par l’UDR-Mwinda. Les deux poids lourds, Bernard Kolélas et André Milongo, géniteurs de ces partis n’étant plus de ce monde, le Pool et le sud de Brazzaville que régentaient naguère leurs formations ont lâché du lest : le Rassemblement citoyen de Claude Alphonse N’Silou accumule des conquêtes, le Conseil national des républicains de Frédéric Ntoumi Bintsamou reste en embuscade, le Parti pour la sauvegarde des valeurs républicaines de Michel Mampouya continue de persévérer, la Dynamique républicaine pour la démocratie d’Hellot Matson-Mapouya fait feu de tout bois. Il est sûr et certain que la passe d’armes entre ces partis, pour certains frères au sein de la majorité présidentielle, pourrait être chaude.

Niari : l’Union panafricaine pour la démocratie sociale n’est plus la seule maîtresse de maison ici, encore mois dans la Lékoumou, ou dans la Bouenza voisines. Mais le parti de pascal Lissouba garde de solides assises dans ces trois départements au point de ne jamais sortir bredouille à chaque scrutin. Mais il fait désormais face à de plus en plus de candidats indépendants ou à des partis dissidents, alors même que le PCT est devenu son plus grand rival sur ces terres qu’elle considérait auparavant comme ses chasses gardées.

Pointe-Noire et Kouilou : de tous les partis en déliquescence après la disparition de leur fondateur, le Rassemblement pour la démocratie et le progrès social (RDPS) est peut-être le seul qui a su faire taire ses querelles intestines. L’instrument de combat de Jean-Pierre Thystère Tchicaya a refait son unité. Il devra pourtant concourir dans le Kouilou et à Pointe-Noire contre un rival tout à fait proche, le Mouvement action et renouveau (MAR) de Jean-Baptiste Tati-Loutard. Les héritiers Bernard Mbatchi (RDPS) et Roland Bouiti-Viaudo (MAR) ne maqueront pas de se défendre avec opiniâtreté, comme ils l’ont souvent fait.

Plateaux : au regard du boycott prôné par certains ténors natifs de ce département, en l’occurrence Clément Mierassa du Parti social-démocrate congolais, Mathias Dzon de l’Union patriotique pour le renouveau national, André Nganguia Engambé, ancien candidat à la présidentielle de 2009 comme les deux autres, la rivalité pourrait connaitre son point d’orgue à Ngo « la Boussole ». Depuis toujours, l’Union patriotique pour la démocratie et le progrès d’Auguste-Célestin Gongarad-Nkoua et le Rassemblement des forces démocratiques de Joseph Miokono-Hondjuila n’ont jamais manqué la compétition. Ils monteront sans doute encore sur leurs ergots.

Toujours dans les Plateaux, l’Union des forces démocratiques de Charles-David Ganao n’abandonnera sans doute pas Djambala et ses environs ; le PCT ne se fera pas marcher sur les pieds dans cette partie du pays où, tout comme dans la Cuvette-Ouest, la Sangha et la Likouala, il se taille toujours la part du lion. Attention, d’éventuels candidats indépendants dans la Cuvette-Ouest annoncent qu’ils ne lésineront pas sur les moyens et prendront la place qui leur revient dans la compétition pour l’attribution de sièges dans les conseils départementaux. Pour dire qu’il y aura, partout, de la rivalité à faire oublier certaines consignes… démocratiquement !

Gankama N’Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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