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Séduction 13

Samedi 3 Juin 2023 - 18:45

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Un accord en treize points, conclu le 29 mai à Beijing, a marqué la fin de la visite d’Etat du président de la République démocratique du Congo (RDC) en République populaire de Chine (RPC). Félix Tshisekedi et son homologue chinois, Xi Jinping, se sont félicités du nouvel élan impulsé à leurs relations diplomatiques vieilles aujourd’hui de cinquante et un ans. Entre Kinshasa et Beijing, la coopération est désormais placée sous le sceau du partenariat « stratégique », le niveau le plus élevé en la matière pour deux Etats qui se rapprochent davantage.

Cet aboutissement est la conséquence des concessions faites par chaque partie à l’issue des discussions ayant pour l’essentiel permis de revisiter les précédents accords et de redéfinir le nouveau cadre de coopération : éducation, recherche scientifique, santé, infrastructures, mines, agriculture, numérique, environnement, développement durable, hydrocarbures, culture, tourisme, énergie, défense et sécurité, le tour d’horizon entrepris par le grand accord est complet. La diplomatie a beaucoup joué car les deux pays en ont eu besoin pour mesurer le niveau de soutien que l’un peut apporter à l’autre dans les domaines de leur politique intérieure et extérieure.

Confrontée à une vague des rébellions tentaculaires dans l’Est de son territoire, la RDC a obtenu de la Chine une condamnation claire des forces impliquées dans la déstabilisation de ses frontières. Les noms étant odieux, les autorités chinoises ne sont pas allées jusqu’à en citer certains, mais en plaidant un soutien « ferme » à leurs homologues rd-congolaises, elles ont fait mieux en élargissant cet appui à la mise en œuvre sereine de « l’agenda politique interne majeur » de la RDC. Le pays s’apprête, comme on le sait, à renouveler les mandats électifs de ses dirigeants à la fin de cette année.

De son côté, Kinshasa a renvoyé l’ascenseur à Beijing en réitérant son adhésion au principe d’une seule Chine. Pour les autorités chinoises, qu’il pleuve ou qu’il neige, la cause taïwanaise est une cause nationale sacrée. Quand il est fait allusion au dossier de Taïwan en ces termes-là, le complément d’objet direct est de rappeler l’impérieuse nécessité qui s’impose à tous de respecter l’ordre international fondé sur le droit de chaque peuple à disposer de lui-même et à choisir librement son modèle de développement. Les deux partenaires l’ont répété.

Maintenant, parlons affaires : le nouvel accord de partenariat entre la RDC et la Chine séduit encore un peu plus dans son volet économique. Point 10 : « La partie congolaise continuera d’améliorer son environnement d’affaires, de sorte à fournir des conditions favorables aux activités des entreprises chinoises sur son sol et à préserver effectivement leurs droits et intérêts légitimes, tout en exigeant le respect par les entreprises publiques et privées chinoises des lois et règlements en vigueur en RDC ».

Si l’on devait employer l’expression consacrée, on dirait de ce point 10 du nouveau partenariat stratégique entre la RDC et la Chine qu’il épouse le langage du « gagnant-gagnant ». Il a été souvent reproché aux sociétés étrangères qui s’implantent en Afrique, chinoises y compris, d’en faire à leur tête ; et aux gouvernements du continent de fermer les yeux sur les nombreux abus constatés. Peut-être donc, pour Kinshasa et Beijing, l’heure a sonné de ne plus jouer à cache-cache.

Entre ceux qui possèdent l’expertise qu’ils devraient à terme en principe partager, et ceux qui détiennent les richesses naturelles soumises à l'exploitation pour le bien commun, la règle convenable doit être du « 50-50 ». Dans sa célèbre chanson « Séduction 13 », Alain Barrière conseille de tenter de séduire l’âme que l’on convoite autant de fois. A ne pas dépasser le seuil de la treizième fois sans succès car vous n’y parviendrez plus. A leur avantage, la RDC et la RPC ont convenu, au point 13 de leur accord, d’approfondir leur coopération. Une chance qu’elles devront saisir pour le bien de leurs peuples.

 

Gankama N'Siah

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