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Les voix de la raison

Lundi 12 Juillet 2021 - 15:30

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Désarticulée depuis l’intervention dite humanitaire menée par l’OTAN en 2011 suivie de la chute de son guide Mouammar Kadhafi, la Libye est dans un état déplorable. Le territoire est dans son ensemble un espace de non-droit. L’absence d’une autorité unifiée a fait de ce pays un terrain propice à la prolifération des organisations criminelles qui se livrent à de divers trafics, notamment d’armes de tous calibres et de la drogue. Dix ans après le début du printemps arabe de 2011, la Libye continue à s’enfoncer dans la spirale destructrice avec des conséquences néfastes sur les pays voisins et surtout ceux du Sahel tels que le Mali, le Burkina Faso, le Niger, et dans une certaine mesure le Tchad.

 

Alarmé par le désastre qui s’emparait de la sous-région avec les attaques jihadistes au Sahel et le vide sécuritaire créé par la crise libyenne, le président nigérien Mahamadou Issoufou, en son temps, n’avait cessé d’attirer l’attention sur ce drame : « la communauté internationale est responsable de ce qui nous arrive à travers sa décision désastreuse d'intervenir en Libye ». Et il estimait que la Libye étant africaine, il était inconcevable de régler le problème libyen en laissant à l’écart l'Union africaine. Le président tchadien Idriss Déby Itno, rappelant le « service après-vente », ne disait pas autre chose : « la bataille contre le terrorisme au Sahel passe forcément par le règlement de la crise libyenne. Le chaos libyen (...) demeure la principale source de déstabilisation de l'ensemble du Sahel ». Ces voix ont-elles seulement été entendues ? Rien n’est moins sûr, au regard de la multitude des conférences organisées dans les capitales occidentales sur ce pays.

 

De Rome à Berlin en passant par Paris, toutes les réunions visant à sauver la Libye du marasme se sont soldées par des échecs. Sans doute, ces nombreuses médiations et la marginalisation de l’Afrique ajoutent la complexité à cette crise. Pourtant plusieurs voix n’ont pas manqué de convier la communauté internationale à la raison. D’abord celle du président de la Commission de l'Union africaine. Moussa Faki Mahamat demandait à la communauté internationale de se joindre à l'Afrique dans la recherche d'un règlement pacifique de la crise en Libye, tout en mettant en garde sur ses « conséquences dangereuses » pour l'ensemble du continent.

 

Un appel qu'a lancé également le président congolais, Denis Sassou N’Guesso, président du Comité de haut niveau de l'Union africaine sur la Libye : « la Libye est un pays africain et les victimes du conflit libyen sont essentiellement en Afrique. Dès lors, toute stratégie de règlement de la crise libyenne tendant à marginaliser le continent africain pourrait se révéler complètement inefficace et contre-productive ». Le président congolais avait mis les pieds dans le plat en faisant cette déclaration devant des diplomates africains et occidentaux à Brazzaville, le 30 janvier 2020, lors du 8ème sommet des chefs d’Etat et de gouvernement du comité de haut niveau de l’Union africaine sur la Libye. 

 

La dernière Conférence de Berlin, à laquelle ont pris part, entres autres, le Congo, l'Égypte, l'Algérie et l'Union africaine, n’a pas non plus fait entendre la voix de l’Afrique, tant les intérêts et les contradictions des occidentaux sur ce pays sont trop criants, et c’est à déplorer. La Libye demeure à ce jour un casse-tête pour le monde et pour l’Afrique !

 

La désignation d'une autorité exécutive unifiée pour mener la transition à Tripoli et les démarches du guide spirituel, Cheikh Farah Jaâbiri de la Communauté Ibadite de l’Afrique du Nord, auprès du président Denis Sassou N’Guesso vont peut-être raviver l'espoir d’une stabilisation progressive de la Libye. La prochaine rencontre entre le président congolais Denis Sassou N’Guesso, président du Comité de haut niveau de l'Union africaine sur la Libye et le président du conseil présidentiel libyen Mohamed Al-Manfi pourrait augurer un début de sortie de crise.

Valentin Oko

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Édition Quotidienne (DB)

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