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Max Massengo, le « chef des chefs »

Samedi 15 Février 2014 - 14:34

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Indétrônable Max Massengo, le chef des chefs, qui recompose son parcours à travers la réédition de ses œuvres, dont quelques joyaux inoxydables de la chanson congolaise moderne, réalisées, il y a plus de cinquante ans pour certaines d’entre elles, avec l’orchestre Negro Band. Max Massengo le sphinx est toujours là.

Pendant la décennie 1950, Léopoldville est le centre névralgique de la musique congolaise, en raison des structures d’enregistrement installées dans cette ville par des commerçants grecs, parmi lesquels les frères Jéronimidis, Moussa Benathar, Papadimitriou ou Dino Antonopoulos. Pour des raisons professionnelles, de nombreux Brazzavillois s’installent sur la rive gauche du fleuve Congo. Ils vont marquer de leur empreinte la vie musicale kinoise. C’est donc naturellement, pourrait-on dire, que le Negro Band y naît le 18 novembre 1958. Le nom de cet orchestre est, sans doute, inspiré par Negro Jazz, creuset de musiciens comme Jean-Serge Essous, Edo Ganga, Célestin Kouka, Nino Malapet, Bruno Yengo, Pierre Loukouamoussou, entre autres, sous la houlette de Joseph Kaba puis de Guy-Léon Fylla.

Le Negro Band est porté sur les fonts baptismaux par de jeunes gens qui se lancent dans le grand bain musical après des expériences dilettantes : Max Massengo, Franklin Boukaka, Michel Boyibanda, Elo, Denis Loubassou dit Tintin, Jean Mokuna « Baguin », Damien Demoulend. Arrivent ensuite Louis Nguema « Lily », dont le père fut parmi les pionniers de la musique congolaise moderne, Jean-Marie Foussikou dit Nezy, et Joseph Kasongo alias Démon Kasanaud. Le Negro Band démarre ses activités au bar Domingo. Quelques mois après, il s’installe à Brazzaville. Mais c’est à Léopoldville qu’en 1959 le Negro Band enregistre aux Éditions Ndombé (Esengo) les chansons Mado Ndombe (Nezy) et Kumaye (Max Massengo).

Rigobert Massengo, dit Max. Ecce homo. Il est né le 28 décembre 1938 au quartier Bacongo à Brazzaville. Marié, il est père de quatre enfants. Il débute dans l’orchestre Sexy Jazz avant la création du Negro Band, point de départ de son parcours professionnel. Son instrument de prédilection est la clarinette, d’où son nom de scène, Max Clari. Il a remisé cet instrument pour le saxophone, désormais son compagnon de route.

Pendant des années, Max Massengo est l’âme de l’orchestre Negro Band qu’il conduit au Congo, en Afrique et en Europe. On se souvient de la mémorable épopée en Côte d’Ivoire de ce groupe. En 1966, Jackson Gangbo, producteur de leur tournée, abandonne l’orchestre et les musiciens à l’étape d’Abidjan. Pas moyen, pour ces derniers, de rentrer au Congo. C’est grâce à une avance sur les droits d’auteur, versés par la Sacem (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique), que le « chef des chefs » réussit à ramener ses troupes au Congo. Quatre éléments prennent la poudre d’escampette au moment de l’embarquement : José Missamou, Jean-Raph Loumbé, Maurin Zalakanda et Julio Lucas. Ils disparaissent dans la nature. « Les Zoulous », qu’ils vont créer à Abidjan, devient l’orchestre de référence en Côte d’Ivoire pendant de nombreuses années.

Signe de son dynamisme, Max Clari, à la tête de son Negro Band, se rend plusieurs fois en Europe, ramenant, chaque fois, outre des disques, des équipements de musique. Mais le début de la décennie 1970 est désastreux. L’orchestre connaît des scissions et des départs qui l’affaiblissent. Pour se maintenir sur l’orbite musicale brazzavilloise, le chef des chefs crée l’orchestre Mbunzila, dénomination suggérée par un de ses succès des années 1960 Mbunzila kamboka tambwanko. Il s’agit, dans cette chanson d’une femme infidèle qui, après avoir dénigré publiquement son époux, s’en va chez ses parents. Désormais libre, elle vivote. Redoutant de basculer dans la prostitution, elle reconsidère sa position et décide de regagner le domicile conjugal. Triomphateur, le mari l’apostrophe superbement : « Pourquoi reviens-tu ? Il paraît que je suis indigent ! »

L’orchestre Mbunzila vit d’expédients avant de sombrer corps et biens. Suit une période erratique pour le chef des chefs. Depuis quelque temps, il essaie de faire revivre le Negro Band en compagnie de son compère Michel Boyibanda, autre cofondateur de cet orchestre qui a connu son heure de gloire. La duplication de leurs anciennes œuvres est la première étape de cette résurrection. Bon vent à l’artiste !

Mfumu

Edition: 

Édition Quotidienne (DB)

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