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Pour un référendum constitutionnel

Vendredi 28 Février 2014 - 0:15

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25 février 2014 : vingt-troisième anniversaire de l’ouverture de la Conférence nationale souveraine ; 21 février 2014 : ouverture du Conseil national des sages au palais du Parlement. Ces deux événements ont inspiré ce papier sur le référendum constitutionnel. Et pour cause !

Avec quelques compatriotes, Martin Mberri et Grégoire Lefouoba, entre autres, nous glosâmes, à l’époque sur les faiblesses de la Constitution du 20 janvier 2002. Curieusement, en 2014, certains des contestataires de ce texte constitutionnel deviennent des croisés du statu quo. On les trouve aussi bien du côté du pouvoir que de l’opposition. L’homme, de toute façon, « est de nature changeante dans la main du temps ». Certes, il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas, mais dans ce cas précis, si ce n’est pas de l’escroquerie intellectuelle, ça y ressemble.

Cette transgression « épistémologique » des néocroisés, regrettable reniement et « renversement de positif en négatif », comme dirait Michel Foucault, est la preuve de l’inutilité avérée de nos constitutions, plombées par des tares congénitales. Ne servant à rien, elles peuvent dès lors prétendre à être tout. Taillées sur mesure, pour ou contre un individu, hagiographiques ou règlements de comptes, les constitutions congolaises, en général, ont très vite montré leurs limites. Celle de 1992, « consensuelle » à souhait, n’a pas échappé à l’autodafé de ceux qui l’avaient élaborée. Il faut sortir de l’ambiguïté et du double langage. Aujourd’hui, l’arsenal constitutionnel congolais est caduc et affaibli.

À quoi sert une constitution ? Favoriser un fonctionnement fiable, cohérent, apaisé et bénéfique des institutions d’un pays en fonction de son génie propre. Depuis la première constitution, ce génie n’est pas pris en compte. C’est la faiblesse majeure et rédhibitoire de toutes nos lois fondamentales. Il est peut-être temps de penser à une autre approche de la question constitutionnelle qui rompe avec le servile placage de la Constitution française de 1958 sur notre contexte qui a ses spécificités. Depuis l’indépendance, nos constitutionnalistes, peu inventifs, ont fait fi de l’existence au Congo des royaumes et des chefferies.

L’heure est arrivée d’envisager un syncrétisme entre la modernité de la république et les valeurs sociétales authentiques de nos royaumes et chefferies. La coutume, ne l’oublions pas, loin de nous tout angélisme, a permis la gestion de nos contrées en toute harmonie. Ce n’est pas trop demander aux nouveaux croisés de la constitution de 2002 que de leur suggérer de devenir des pessimistes conscients, c’est-à-dire, des hommes qui pensent que les choses pourraient aller mieux.

Comme nous l’avons déjà écrit, ici et ailleurs, évitons les joutes sémantiques inutiles, prenons le temps de réfléchir pour permettre enfin à nos talents mis en commun d’accoucher, sans passion ni parti-pris, d’une constitution qui soit le reflet de la réalité de notre pays et de ce que nous voulons qu’il soit en définitive.

Il importe d’intégrer notre génie propre dans la réflexion sur la nouvelle constitution, d’envisager aussi, dans le même esprit, la palabre comme moyen de prévention et de règlement des conflits en raison de sa vertu et de sa fonction délibérative et de purgation des passions. Le Conseil des sages, dont la parole est l’outil par excellence, qui vient de se réunir à Brazzaville, est un cas topique du nouveau débat constitutionnel. Son irruption au premier plan de l’actualité montre à suffisance qu’il n’est pas une survivance folklorique, mais une réalité bien vivante qui a vocation à s’insérer dans le paradigme républicain.

Comment nos royaumes et nos chefferies étaient-ils gérés ? Comment intégrer, dans la marche de l’État moderne les sages, les rois, les chefs traditionnels et les valeurs homéostasiques qu’ils portent ? L’objectif de ce questionnement est de mettre en lumière les signes de vitalité de la gouvernance chez nous, dans nos contrées ; de donner une place à notre identité pour féconder la réflexion à mener sur la constitution. C’est en cela que notre démarche dans la recherche d’un texte constitutionnel équilibré sera novatrice, au-delà des questions subsidiaires qui alimentent les débats entre les politiciens de tous bords.

Ici, dans ce papier, il s’agit de proposer un changement d’approche. Redonner la parole au Congo éternel, c’est-à-dire, au peuple, dont l’expression est entravée et confisquée par des politiciens qui se sont donné comme mission de parler en son nom, souvent, sans en avoir reçu mandat, comme à la Conférence nationale souveraine, dont nous avons célébré le 25 février le vingt-troisième anniversaire.

On ne fait pas le bonheur des gens malgré eux. Au Congo, tout le monde parle au nom du souverain primaire sans lui laisser parfois le plein exercice de sa souveraineté par voie de référendum. L’enjeu politique est, cette fois-ci, de lui permettre de faire entendre sa voix pour un aggiornamento constitutionnel.

Mfumu

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Édition Quotidienne (DB)

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